Tout va mal au ministère de l’Intérieur. D’un côté, le Conseil Constitutionnel l’oblige à une réforme totale de la garde-à-vue ; de l’autre, la place Beauvau abandonne d’elle-même certaines prérogatives de surveillance… pour cause de réduction des coûts. Le 25 juin dernier, le directeur des libertés publiques et des affaires juridiques a en effet annoncé, par une simple et pudique « note d’information », la fermeture de la « cellule du dépôt légal des périodique s ». Pour mémoire, les éditeurs sont soumis à deux régimes de « dépôt légal » de leurs publications. Le plus connu dépend de la Bibliothèque nationale et vise toujours les « imprimés de toute nature », des périodiques aux livres, en passant par les affiches : n'en sont exclus que les « bilboquets » ou « imprimés de ville », ce qui regroupe, par exemple les faire-part, les étiquettes, les formulaires administratifs... Tout éditeur doit adresser deux exemplaires de chaque publication à la Bibliothèque nationale, ou aux bibliothèques provinciales habilitées, et ce, au moins quarante-huit heures avant la mise en vente. Avant un décret du 13 juin 2006, le nombre d’exemplaires destinés aux bibliothèques était de quatre. Les parutions devaient en outre être déposées en un exemplaire auprès du ministère de l’Intérieur. Depuis ce même décret, seuls les périodiques — dont, bien entendu, les revues publiées par les maisons d’édition de livres — doivent, en sus du dépôt auprès des bibliothèques, être expédiés au ministère de l’Intérieur (ça sentait déjà le relâchement à la maison poulaga, comme l’aurait écrit Simonin). Ce qui, depuis 2006, donnait pour texte réglementaire applicable au versant surveillance : « Les périodiques édités ou importés dans les départements métropolitains et d'outre-mer, pour être mis à la disposition d'un public, sont déposés, au plus tard le jour de leur mise en circulation par leur éditeur ou importateur, en un exemplaire au service du dépôt légal au ministère de l'Intérieur pour les éditeurs et importateurs ayant leur domicile ou siège social à Paris et auprès de la préfecture du département pour ceux situés dans les autres départements. » Et voilà que Brice Hortefeux saborde ce texte au motif que l’heure est aux économies, sans en passer par un décret en bonne et due forme modifiant celui précité. Paris a donc perdu en même temps sa garden-party et son dépôt légal policier : le sens de la fête et du flicage partent à vau-l’eau ! Ce qui signifie concrètement que les éditeurs de province sont toujours tenus de déposer en préfecture. Quant aux Parisiens, il faut espérer que le ministère de l’Intérieur ne les poursuivra pas faute d’avoir obtempéré à un texte réglementaire officiellement toujours en vigueur ; qui vise au titre d’un tel manquement « l'amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe et, en cas de récidive, (…) l'amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe en récidive ».