8 janvier > Roman France

En sept livres, quatorze ans de "carrière" et une forte tendance à surprendre et réjouir son lecteur, Patrice Pluyette est un romancier rare et précieux. Après les épopées maritimes parodiques, ce Breton d’adoption regagne la terre ferme, le terroir, même-là où se commettent en toute discrétion les crimes les plus sordides.

C’est ainsi qu’Odile, une fille de gendarme, fiancée à Francis et amie de l’infirmière Gisèle, disparaît un soir alors qu’elle devait aller dîner chez elle. Le corps ne sera jamais retrouvé. Les soupçons de Rivière, le policier spécialiste des œuvres d’art volées, se portent sur le compagnon de la victime. D’autant que leur couple ne marchait pas très fort, que le garçon se sentait un peu "comme un espadon dans une baignoire", avec ses rêves de jeunesse englués dans un quotidien pas très réjouissant. Odile n’était pas une rêveuse, plutôt une joggeuse. Francis, alors, serait-il un serial killer, auteur d’autres crimes bizarres ? Sans doute pas. N’empêche qu’il se prétend coupable, est arrêté, et signe des aveux délirants, juste pour exister.

Le vrai coupable, ne serait-ce pas ce Patrick Legousse, un éleveur de porcs débile, pervers, amateur de poupées gonflables qu’il fait venir de Californie, à qui il invente des vies réelles, des sentiments… En plus de son petit harem personnel, qu’il habille, sort en ville, il est amoureux de Geneviève, l’héroïne des Parapluies de Cherbourg : détraqué ou maniaque inoffensif ? La police l’arrête, puis le relâche, faute de preuves. Et pourtant…

On n’en révélera pas plus, laissant au lecteur le plaisir de suivre Patrice Pluyette dans les méandres de son imagination et de cet antipolar rural, tronçonné en courts chapitres-séquences, servi par un style alambiqué, riche en rapprochements saugrenus, en histoires adventices dans lesquelles on se perd un peu : qu’est-ce que Rivière est allé faire à San Diego, et quelle est la nature de ses rapports avec sa collègue Julie Salvador ? Voilà des petits mystères qui resteront irrésolus. Mais pas la disparition de cette pauvre Odile. Jean-Claude Perrier

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