En plein questionnement, l'hypermarché et surtout son avenir divisent jusque chez les experts. S'ils s'accordent sur la mutation en cours du modèle commercial de l'hyper, Franck Gintrand, délégué de l'Institut des territoires et auteur du livre Le jour où les zones commerciales auront dévoré nos villes (Thierry Souccar éditions), et Jean-Louis Martinez, directeur des contributions académiques au sein du groupe d'écoles de commerce Inseec et auteur de La fin des hypermarchés ? Vers une redistribution de la grande distribution (La Charte), ne sont d'accord ni sur les causes, ni sur les perspectives d'évolution des grandes surfaces.

Pour Jean-Louis Martinez, les hypermarchés enregistrent une « perte de trafic due à l'effet conjugué des drive et des pure players, qui questionnent le schéma de la grande distribution ».

Frank Gintrand avance, lui, « une érosion des marges. C'est la rentabilité du modèle qui est en question, et non sa fréquentation. 60 % des Français continuent à faire leurs achats en hypermarché, et c'est particulièrement vrai dans les villes moyennes. »

Modèle américain

Selon le délégué de l'Institut des territoires, l'avenir est donc à chercher du côté de l'immobilier commercial. « A travers la location de locaux commerciaux, les enseignes vendent leur attractivité et trouvent de nouveaux relais de croissance. Mais du coup, elles agrègent autour d'elles une série de commerces complémentaires, proches de ceux que l'on trouve traditionnellement en centre-ville », détaille Franck Gintrand. Dès lors, on se rapproche du modèle américain. « Au schéma "tout sous un même toit", qui fut pendant longtemps le credo de la grande distribution en France, est en train de se substituer la stratégie du "tout autour de moi". » Cette perspective laisse peu de place au livre au sein des hypermarchés, qui privilégieraient de plus en plus l'alimentaire, et consacre plutôt le développement de grandes surfaces spécialisées, ou de librairies, autour des hypermarchés.

A l'inverse, la théorie développée par Jean-Louis Martinez laisse entrevoir un avenir plus ouvert. Pour le spécialiste en stratégie marketing et commerciale, l'hypermarché est appelé à se transformer en « une espèce de show-room où les fabricants et fournisseurs délivreront de l'information et proposeront leurs produits ». Les éditeurs disposent alors d'une belle carte à jouer. « S'ils parviennent à s'emparer de ce concept, veut croire l'enseignant, ils peuvent créer des espaces qui deviendraient des sortes de salons littéraires. Alors, l'hypermarché pourrait devenir un remarquable outil de promotion pour le livre. »

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