Qu’ont en commun Arthur Schnitzler, Taslima Nasreen, Jean-Christophe Rufin, Robin Cook ou Martin Winckler ? Ils sont tous médecins et écrivains. C’est aussi le cas de l’Indien Anirban Bose, inconnu en France, et pour cause : il n’avait jamais été traduit en français. Dans La mort de Mitali Dotto, il revêt sa blouse blanche pour se glisser dans le personnage de Neel Dev-Roy, à qui il prête en partie ses traits : l’écrivain et son héros ont étudié leur métier en Inde, avant d’aller l’exercer aux Etats-Unis. Ils sont ensuite revenus au pays, en pensant pouvoir lui apporter leur expérience. C’est à ce moment précis que s’ouvre le roman.
Neel et sa femme, la téméraire Stuti, s’installent à New Delhi pour entamer un nouveau chapitre de leur vie. Il suffit de quelques semaines à l’hôpital pour que le chirurgien prenne conscience de sa naïveté. Cette jungle cache en réalité des jeux de pouvoir et d’argent, au détriment des patients. Neel Dev-Roy découvre avec effroi que le serment d’Hippocrate vire au serment d’hypocrites. Mitali Dotto cristallise toutes ces crispations : la jeune fille, plongée dans le coma, n’a pas de revenus suffisants pour être maintenue en vie. Révolté, le médecin se bat contre des confrères qui lui livrent une guerre sans merci. Une attitude qui ne plaît guère à tout le monde… Neel et sa femme sont menacés.
La réalité de ce pays, qu’ils pensaient pourtant connaître, leur saute chaque jour à la figure. "Nous sommes en Inde où les ressources sont limitées. Ce n’est pas écrit dans les livres, c’est la vraie vie", affirme son supérieur. Le héros refuse de renoncer à ses principes et à ses valeurs. D’autant que ce justicier est le fils d’un éminent docteur, brusquement disparu. Ce père méconnu auréole sa réputation d’utopiste, mais qui était vraiment cet homme "idéaliste, passionné, polémiste" ? Il est peut-être temps pour Neel de se pencher sur la question. A travers son parcours fictif, le romancier éclaire deux sujets brûlants en Inde : la corruption et le trafic d’organes. "Même l’argent n’achète pas la vie."K. E.
