Si on regarde leur salaire annuel moyen, les jeunes cadres de l’édition fraîchement embauchés gagnent en 2013 un peu mieux leur vie que l’année précédente : 34 104 euros bruts pour la catégorie C1A, correspondant au premier échelon de l’encadrement, contre 33 943 euros en 2012. Mais le salaire médian, moins sensible aux valeurs extrêmes, connaît une évolution inverse : en 2013, la moitié des effectifs gagne moins de 33 465 euros contre 33 585 euros l’année précédente, selon le dernier rapport social de la branche de l’édition. Sur les trois autres échelons dont les effectifs intégrés dans l’étude dépassent 500 personnes, la situation est contrastée entre hausse et baisse suivant l’indicateur retenu, autour de 41 000 à 42 000 euros pour les catégories C2A et C2B, mais elle est positive pour la catégorie C3A dont le salaire médian (51 634 euros) et le salaire moyen (54 164 euros) progressent en 2013. "A périmètre comparable, les valeurs mini et moyennes pour l’ensemble des catégories sont en hausse sur la plupart des échelons. Les valeurs médianes sont stables", analyse le Syndicat national de l’édition (SNE) dans le commentaire accompagnant ce rapport, qui sert de base aux négociations annuelles sur la grille des salaires de la convention collective.
Le calcul d’un salaire moyen pour l’ensemble du secteur serait peu significatif, mais l’observation des salaires des cadres moyens permet en revanche de donner une idée des rémunérations les plus courantes du secteur : les cadres représentent 64 % des effectifs de l’édition, devant les employés (19,7 %) et les agents de maîtrise et techniciens (16,2 %). La proportion des femmes est également importante et stable, à 74 % des effectifs. En moyenne, dans l’ensemble des secteurs disposant d’une convention collective, le taux d’encadrement est de 16,6 %, et les femmes représentent 43,7 % des effectifs, selon la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares). Seules les directions de la fabrication restent des bastions masculins, occupées à 65 % par des hommes. De nombreux autres métiers sont en revanche si féminisés que leurs intitulés devraient l’être aussi : attachée de presse (93 %), assistante commerciale (93 %), assistante d’édition (89 %), "cheffe" de produit (88 %), responsable des études marketing (85 %), responsable cession et acquisition de droits (84 %), éditrice (84 %), technicienne de fabrication (84 %), responsable d’édition (83 %), cadre de fabrication (83 %).
Un secteur inégalitaire
La question de l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, qui a fait l’objet de nouvelles dispositions législatives avant l’été, est très suivie depuis les trois derniers rapports de branche. Selon les estimations de la Dares, le secteur serait plus inégalitaire que les autres en dépit du nombre très majoritaire de femmes qui y travaillent : l’écart de salaire serait de - 24 % en leur défaveur, contre - 20,7 % pour les secteurs dotés d’une convention collective. Il s’agit toutefois d’une moyenne générale, qui reflète aussi l’inégalité d’accès aux postes les plus élevés : les femmes représentent 80 % des employés, mais 71 % des cadres. Le rapport de branche fait une analyse plus fine par métiers, âges et anciennetés.
L’ensemble de ces critères fait même apparaître quelques métiers où le salaire médian des femmes dépasse celui des hommes : "directeurs artistiques, assistants commerciaux, directeurs du marketing, attachés de presse, techniciens de fabrication, responsables cession acquisition de droits", note le SNE. Mais dans tous les cas, le différentiel peut s’expliquer par une ancienneté ou un âge supérieurs. En revanche, les écarts mesurés en faveur des hommes pour "les directeurs éditoriaux, contrôleurs de gestion, responsables d’édition, correcteur, directeur de fabrication, responsable commercial, chef de produit, chef de fabrication et délégué pédagogique ne sont pas expliqués par cette corrélation âges médians/salaires médians", constate le SNE. Le rapport ne mesure pas une explication possible : à libellés de postes identiques, les femmes se trouveraient plutôt dans des maisons plus petites, ou encadrant des effectifs moindres, et justifiant donc des salaires inférieurs.
Mais cette hypothèse est insuffisante pour expliquer une inégalité très visible et évolutive sur le tableau des salaires des cadres : "Au premier échelon qui est celui de l’embauche, les hommes et les femmes ont à peu près le même salaire, mais un différentiel grandissant apparaît en faveur des hommes aux échelons suivants. La rémunération des femmes décroche pendant leurs maternités, entre 28 et 45 ans, qui est aussi l’âge des progressions de carrière dont elles ratent des marches", analyse Martine Prosper, secrétaire générale de la branche Livre-édition de la CFDT. De fait, si des hommes prennent bien les quelques jours de congé paternité auxquels ils ont droit après une naissance, strictement aucun d’entre eux n’a pris un congé parental d’éducation, qui suppose une absence du bureau d’une à trois années, alors que près de 60 femmes ont accepté d’y sacrifier leur avancement.
Salaires médians des cadres de l’édition
Alors que le salaire médian des femmes cadres de l’édition est légérement supérieur à celui des hommes à l’embauche (+ 0,2 %, 1er échelon), le différentiel s’inverse et ne cesse de croître, pour atteindre 14,5 % au dernier échelon.