13 FÉVRIER - HISTOIRE France

Raphaël Meltz s'est servi de l'article 26 de la loi sur la presse de 1881 qui dféfinit le délit d'offense faite au chef de l'Etat, comme indicateur pour mesurer l'intensité des joutes politiques de la IIIe République à nos jours. Cet écrivain, scénariste, et un temps directeur de la revue littéraire Le Tigre, raconte le vote de cette disposition et les affaires qui en ont découlé.

Et l'on n'imaginait pas combien cet article 26 fut enterré puis ressorti au gré des républiques et des présidents, de Jules Grévy à Nicolas Sarkozy. Le premier est bien oublié et l'insulte dont il a fait l'objet est aussi pâlotte que sa postérité. Un simple "voyou" valut au journaliste Simon Boubée d'être condamné pour ce délit à trois mois de prison et 1 500 francs d'amende. Et pourtant, la IIIe République fut riche en petites phrases assassines.

Dans ces attaques, la presse n'avait pas le monopole de l'insulte et l'Assemblée nationale n'était pas en reste. Clemenceau, souvent sur le fil du rasoir quand il prenait pour cible le chef de l'Etat, était prudent et restait dans la légalité, ou il attendait que le chef de l'Etat ne le fût plus pour exercer sa verve. Ainsi à la mort de Félix Faure, il eut ce mot : "Félix Faure est retourné au néant, il a dû se sentir chez lui."

Après une IVe République où les présidents sans pouvoir furent ignorés, de Gaulle devint le champion de l'utilisation de l'article 26. Cela entraîna notamment Jacques Laurent dans un procès retentissant, qui lui valut le soutien de gens qui ne partageaient pas ses idées droitières comme Françoise Sagan, Bernard Frank ou Jérôme Lindon.

On s'aperçoit en effet que l'utilisation de l'article 26 est souvent proportionnelle à l'importance donnée au chef de l'Etat. Avec le "Casse-toi pov' con" qui coûta à Hervé Eon 30 euros pour avoir brandi la phrase lors d'un déplacement de Nicolas Sarkozy, l'arme législative se retourna contre celui qu'elle était censée protéger. Car c'est le président de la République qui l'avait prononcée le premier !

A travers ce livre, nous suivons l'évolution de l'invective, de la société française et d'une presse qui utilise moins la satire et les provocations. Une façon de prendre en compte ce qu'est devenu le combat politique. Et pour Raphaël Meltz de plaider pour une suppression de cet article avant que la Cour européenne des droits de l'homme ne le demande, vers 2015...

Les dernières
actualités