On pense aux paroles de Brel, « Chez ces gens-là, Monsieur... », sauf qu'ici on ne boit pas, justement. Le père, mécanicien d'usine dans une banlieue industrielle belge, de « type oriental », ne s'accorde qu'un verre de rosé dans les grandes occasions. C'est un être modeste, complètement effacé, sauf en politique. Communiste convaincu, les seuls livres qu'il lise, avec peine, ce sont les grands classiques russes. D'où engueulades avec sa femme, militante socialiste, qui s'émancipe, se met à fumer, à avoir des amants. Leur fils finit par se demander si ce sont bien ses vrais parents ou s'il n'aurait pas été plutôt adopté, en secret. Là, on pense à un sujet pour Robert Guédiguian. Mais le garçon atypique, complexé, qui se trouve laid, « l'air d'un plouc » et traité comme tel par ses copains de collège, finit par échapper à son milieu et à son métier d'origine, comptable. Il découvre Paris et devient photographe, sa passion depuis tout gosse.

Aujourd'hui, Philippe Herbet prend la plume pour la première fois pour revenir sur cette histoire, contée façon puzzle, par fragments, où l'on apprend progressivement des choses. Les prénoms des parents, par exemple, Alphonse et Julia, ainsi que des histoires sur les grands-parents, les tantes... Cette « famille translucide », comme il dit, ne l'est pas tant que ça. Elle prend de la densité, et puis le temps coule, les parents « rétrécissent à vue d'œil ». Et passe, à travers ces pages, une infinie tendresse.

Philippe Herbet
Fils de prolétaire
Arléa
Tirage: 2 000 ex.
Prix: 15 € ; 100 p.
ISBN: 9782363083043

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