Édito par Fabrice Piault, rédacteur en chef

Photo PHOTO OLIVIER DION

En lançant en 1993, avec les éditions Mille et une nuits, le concept de "livre à 10 francs", Maurizio Medico, le graphiste Nata Rampazzo et Luc Dubos avaient suscité dans le monde du livre une polémique telle qu’il n’en avait pas connu depuis la création, exactement vingt ans plus tôt, du Livre de poche. Sur le modèle des "Mille lire" italiens, en commençant par la Lettre sur le bonheur d’Epicure qui leur tenait lieu de manifeste, ils proposaient de courts essais politiques, des classiques ou même de petits guides, exhumant des curiosités glanées dans les méandres de l’histoire littéraire. Des éditeurs leur ont reproché de casser les prix, des libraires de condamner leur magasin à des marges minuscules avant que Jacques Goupil, alors à la tête de J’ai lu, piqué au vif par cette nouvelle concurrence aux poches traditionnels, ne se lance à son tour avec Librio, obtenant un succès plus important encore.

Vingt-trois ans et un passage à l’euro plus tard, non seulement les trois piliers du "livre au prix d’un café" sont toujours présents sur le marché, mais ils consolident leur identité. Librio renforce sa vocation parascolaire tout en proposant aussi des essais et des titres d’humour. "Folio 2 €" s’installe comme une collection "apéritive" faisant découvrir les auteurs du catalogue Folio, tandis que le pionnier, Mille et une nuits, veut renouer avec l’esprit des origines, à la fois décalé et ancré dans l’actualité.

Surtout, Mille et une nuits, Librio et "Folio 2 €" illustrent la transformation profonde du rapport de l’édition et de la librairie au prix des livres. Depuis leur lancement, de multiples expériences éditoriales ponctuelles ou pérennes à base de prix serrés ont été initiées, dans le champ du pratique comme dans celui de la bande dessinée ou des essais. Les prix des livres se sont à la fois ajustés, modulés et diversifiés, tandis que le prix moyen des livres progressait sensiblement moins que l’indice Insee des prix à la consommation. La preuve que le prix unique du livre n’est, quoi qu’on en dise parfois à l’étranger, ni un facteur de rigidité des prix, ni un encouragement à leur hausse.

19.02 2016

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