Avant-Critique Roman

Dandys entre eux. Par sa vie de dandy insolent et aquoiboniste, par sa mort peut-être plus encore (assassiné par sa jeune épouse, le soir de Noël 1983), Paul Gégauff est une sorte de légende à bas bruit. Ces dernières années, dans des ouvrages inspirés, Éric Neuhoff ou Arnaud Le Guern se sont brillamment acquittés du denier du culte. Si de Gégauff, en plus de ses turpitudes et de ses fulgurances, la postérité a d'abord retenu quelque chose, c'est d'avoir été l'adorable voyou de la Nouvelle Vague, le scénariste de Chabrol, de René Clément ou le mauvais génie de Rohmer. On a oublié qu'avant cela, au cœur des années 1950, à l'enseigne des éditions de Minuit, Gégauff fut aussi l'un des plus remarqués de nos jeunes romanciers, salué par Roger Nimier ou Georges Bataille. Aussi, la réédition aujourd'hui de Rébus, son quatrième roman, peut-elle être considérée comme plus et mieux qu'une simple curiosité.

Ennemis du sarcasme, passez votre chemin. Rébus est une farce, tragique, ironique, une sorte de chaînon manquant entre Ionesco et Des Forêts. L'histoire ou ce qui en tient lieu ? Un groupe de jeunes gens oisifs et argentés se voient conviés par le plus charismatique d'entre eux, un certain Rodolphe, à fêter avec lui son déménagement. L'invitation ne laisse pas de les intriguer et ils ne seront pas déçus du voyage... Malentendus et chausse-trappes se succèdent. Et en fait de déménagement, c'est le paysage intérieur de chacun qui va se trouver de plus en plus bouleversé. Gégauff orchestre ce jeu de massacre en déchirant à belles dents toute propension à un quelconque réalisme. C'est réjouissant comme la folie peut l'être parfois.

Paul Gégauff
Rébus
L’Arbre Vengeur
Tirage: 1 200 ex.
Prix: 17 € ; 198 p.
ISBN: 9782379412158

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