16 août > Roman France > Laurence Cossé

Parce que c’était lui, parce que c’était moi, on connaît la formule de Montaigne pour dépeindre l’amitié qui le liait à La Boétie, ou plutôt pour réduire à néant toute tentative d’explication rationnelle d’un tel lien. S’il entre dans l’amitié moins de mystère irréductible et d’illogique attraction que dans l’amour, la part d’irrationnel n’est pas absente. Des années plus tard, repensant à son ami rencontré à Verbiest, une "prépa" tenue par les Jésuites dite la "BJ", la "boîte jèze", le narrateur de Nuit sur la neige de Laurence Cossé a ces mots à l’endroit de Conrad: "On avait l’impression d’avoir affaire à quelqu’un d’ouvert, d’attentif. Mais après coup on comprenait qu’il était resté sur un quant-à-soi qui le rendait en fait inaccessible, une réserve si profonde qu’aujourd’hui encore je ne peux pas prétendre l’avoir bien connu." Bien sûr, entre les pensionnaires, Robin, le personnage principal qui raconte, orphelin d’un père tombé au front lors de la guerre de 14, et le bel adolescent suisse dont les parents sont séparés, il y a des points communs: la passion de la course à pied, du tennis, et bientôt du ski. Le second initiera le premier à ce sport d’hiver à Saint-Moritz. Les deux garçons bûchent pour les concours blancs sur fond de turbulences politiques. En Allemagne, les nazis sont déjà au pouvoir. En France, les milices d’extrême droite s’agitent violemment: Léon Blum a été agressé. Conrad s’intéresse, Robin s’en fiche. "La grande affaire, c’était la faim d’amour […]." Pâques 1936, les vacances. Robin rend la pareille à Conrad en l’invitant à Val-d’Isère. Au visage de l’ami se substitue celui d’une étudiante en dessin, Clarie. C’est le premier émoi sur fond de neige - l’amour, sa fin, comme un deuil en blanc. S. J. R.

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