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Pape star

Statue de Jean Paul II par Elisabeth Cibot devant la basilique Notre-Dame de Fourvière à Lyon.

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Grande vedette de l’Eglise, Jean Paul II sera canonisé le 27 avril en compagnie de Jean XXIII. Les croyants ne sont pas exempts de la starification à l’œuvre dans notre société, comme le montrent les programmes "spécial canonisation" des éditeurs religieux et la parution, décidée contre la volonté de leur auteur, des notes personnelles de Karol Wojtyla chez Bayard.

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Par Anne Ducrocq, Laurent Lemire
Créé le 17.04.2014 à 19h31 ,
Mis à jour le 05.06.2014 à 16h37

Dimanche 1er mai 2011, Jean Paul II, pape qui a connu l’un des plus longs pontificats de l’histoire - de 1978 à 2005 -, était proclamé bienheureux par son successeur, le pape Benoît XVI. Le 27 avril prochain à Rome, neuf ans après sa mort, en la fête de la Divine Miséricorde qu’il a créée, il sera canonisé par le pape François en une cérémonie unique avec Jean XXIII, autre pape de poids.

De fait, cette canonisation est l’une des plus rapides de l’histoire récente de l’Eglise. Ce record a été rendu possible grâce à l’autorisation accordée par Benoît XVI - à la suite d’une pétition signée par 170 cardinaux - de commencer le procès de béatification avant le délai légal de cinq ans après la mort de l’intéressé. Jean-Paul connaît donc un destin post-mortem aussi exceptionnel que celui qui a été le sien de son vivant. A point nommé, deux jours avant la canonisation, un livre-événement paraît chez Bayard, "Je suis dans les mains de Dieu". Carnets intimes 1962-2003.

 

"On est dans le cœur du réacteur"

 

"On connaît le Jean Paul II écrivain, orateur, théologien. Dans ses Carnets, c’est l’homme en débat avec lui-même, explique Frédéric Boyer, son heureux éditeur. On est vraiment dans le cœur du réacteur. C’est la fabrique personnelle de sa spiritualité et de sa relation à Dieu. Il brasse des références scripturaires, théologiques et littéraires (il aimait beaucoup Dostoïevski, Simone Weil ou encore Shakespeare) très diverses."

Le pape polonais avait fait de son secrétaire particulier, Stanislaw Dziwisz, son exécuteur testamentaire. Dans son testament spirituel, Jean Paul II avait demandé à son plus proche collaborateur de brûler ses notes personnelles.

Dans la préface du livre, le cardinal Dziwisz, aujourd’hui archevêque de Cracovie, explique ce qui fut probablement pour lui un vrai dilemme : "J’ai respecté à la lettre les volontés du Saint-Père, après sa mort en 2005, en donnant toutes les affaires qu’il possédait, en particulier ses souvenirs personnels. Mais je n’ai pas eu le courage de brûler ses carnets personnels parce qu’ils contenaient d’importantes informations sur sa vie. Je les avais toujours vus sur le bureau du Saint-Père, mais je ne les avais jamais ouverts. Quand j’ai pris connaissance de ce testament, j’ai été profondément touché par le fait que Jean Paul II, que j’ai accompagné pendant presque quarante ans, me prouve ainsi sa confiance au point de me confier ce qu’il avait de plus intime et personnel. Je n’ai pas brûlé les carnets de Jean-Paul II parce qu’ils sont la clé pour comprendre sa spiritualité, ce qu’il y a de plus profond en chaque être humain : sa relation avec Dieu, avec les autres et avec lui-même."

C’est donc par profond respect qu’il a d’abord présenté ces Carnets à la Congrégation pour la cause des saints, qui se penchait sur la vie du pape pour son procès en béatification. C’est sans doute dans un douloureux exercice de discernement spirituel qu’il décida finalement aussi, avec l’accord du Vatican, de la publication finale. Cela avait déjà été le cas pour les écrits intimes de Mère Teresa, Viens, sois ma lumière (édition Lethielleux), dans lesquels se trouvent des lettres adressées par la sainte de Calcutta à ses différents directeurs de conscience censées rester privées. Les saints ne s’appartiennent plus, ils appartiennent à l’Eglise…

 

L’aventure du livre en français

 

Le livre de Jean Paul II, des notes rédigées en polonais, sa langue natale, pendant plus de quarante ans (il utilise toutefois le latin ou l’italien, particulièrement pendant les années vaticanes), a été publié en février dernier chez l’éditeur polonais Znak qui en a les droits mondiaux (hors Italie). L’ouvrage était resté confidentiel, l’éditeur ayant communiqué seulement quelques bonnes feuilles en anglais.

Comment ce livre s’est-il retrouvé chez Bayard ? Fin janvier, tardivement du fait des hésitations, l’éditeur polonais contacte ses confrères en France. Les enchères montent assez vite, assez haut. Les relations personnelles qu’entretiennent depuis très longtemps Henryk Wozniakowski, président de Znak, et les dirigeants du groupe Bayard ont probablement favorisé ce choix. "Pour une publication simultanée à la canonisation, nous avons travaillé avec le séminaire polonais catholique de Paris. Une équipe de six personnes a travaillé non-stop, jour et nuit, sept jours sur sept pendant un mois et demi ! Arriver à une parution à J-2 est un petit miracle !", se réjouit Frédéric Boyer.

 

Musclé

 

Le tout donne un livre de 650 pages intellectuellement assez "musclé" qui aurait mérité un travail éditorial de vulgarisation. Mais, l’éditeur d’origine a demandé à ce que le livre soit reproduit in extenso. Les contraintes étaient drastiques : interdiction de faire des coupes, obligation de respecter la présentation typographique des carnets (citations en marge, mots soulignés…). Il n’empêche, l’émotion est là.

Etre près du cœur d’un homme qui commentait ses progrès spirituels, mettait la prière au centre de tout, récitait encore souvent la litanie des saints en polonais et a changé l’histoire de l’Eglise. Un véritable itinéraire spirituel mis en place à 27 000 exemplaires. Ses dernières notes datent du 15 mars 2003, car ensuite il n’était plus capable d’écrire. L’ensemble forme le portrait d’un être qui avait l’âme d’un combattant et une vision de sa propre participation au salut.

A. D.

"Je suis dans les mains de Dieu". Carnets intimes 1962-2003, par Karol Wojtyla, Bayard. 650 p., 24 euros. ISBN : 978-2-227-48758-1. Parution : 25 avril 2014.

Prochaines parutions mondiales :
Avril : Espagne, Amérique latine : Planeta ; Portugal, Brésil : Planeta
Mai : Allemagne, Autriche : Herder
Automne : Italie : Libreria Editrice Vaticana ; Grande-Bretagne et Etats-Unis : Harper Collins ; Roumanie : Humanitas ; Croatie : Verbum ; Hongrie : Szent Istvan ; Slovenie : Druzina ; Corée : St Pauls.

Frédéric Lenoir : "On écrit beaucoup plus sur les religions"

 

Hier Jean-Paul II, aujourd’hui le pape François : le philosophe spécialiste des religions explique l’engouement pour les souverains pontifes et le renouveau des livres sur les religions.

 

"Il y a un engouement pour le message spirituel des religions plus que pour les dogmes, pour tout ce qui aide à vivre." Frédéric Lenoir- Photo CATHERINE THIVENT/LICENCE CCA-SA3.0

(1) François, le printemps de L’Evangile, Fayard, 180 p., 17 euros.


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