"Mon problème, c'est que j'ai décidé de devenir écrivain dans un pays où les numéros un ne sont pas Babel ou Camus, mais l'auteur des Considérations d'un apolitique [Thomas Mann, NDLR] qui, jusqu'à sa mort, soupçonna les Temps Modernes d'être une invention juive." Au fond, Maxim Biller a non pas un, mais trois problèmes : il est juif, il est allemand, il est écrivain. Découvert en France en 1992 avec la publication de Ah ! Si j'étais riche et mort, son livre le plus connu, il demeure avec 24 heures dans la vie de Mordechaï Wind (Denoël, 2001). Il intègre aujourd'hui le catalogue des éditions de L'Olivier avec un recueil de nouvelles, L'amour aujourd'hui, et un autoportrait grimaçant, Le Juif de service, où l'un répond à l'autre, en fournit comme le mode d'emploi et le commentaire. Derrière un goût pour la provocation et les tête-à-queue idéologiques, Biller s'y affirme comme un moraliste, adepte d'une noirceur allègre, qui sait que quitte à avoir de l'esprit, autant qu'il soit mauvais... La judaïté et les femmes constituent son fond de sauce, dans un registre où, comme chez son maître, Mordecai Richler, l'humour, paravent des émotions, ne protège de rien, sinon d'un obscène narcissisme. Dans L'amour aujourd'hui, >recueil de 27 courts récits comme autant de désastres intimes, entre l'Allemagne, l'Europe de l'Est et Israël, des hommes fatigués s'essayent à aimer des femmes dont l'absence d'illusions fait l'essentiel de leurs charmes. C'est cru, drôle, triste et beau.
Né à Prague en 1960, de parents juifs russes, émigré en Allemagne à l'âge de 10 ans, d'abord à Munich et aujourd'hui à Berlin, Maxim Biller est le mauvais sujet de la littérature allemande en même temps que sa mauvaise conscience. Et ses livres prouvent que s'il y a bien un pays pour les Juifs, c'est parfois la littérature tout autant qu'Israël.