Le prix Nobel de littérature 2010 a été attribué ce jeudi 7 octobre à l'écrivain hispano-péruvien Mario Vargas Llosa, âgé de 75 ans. Récemment, dans
Le Figaro, il avait évoqué le prix suédois : «
Je ne crois pas qu'un écrivain doive parler du prix Nobel, ça n'est pas bon pour le style ». Il a appris la nouvelle à 6 heures du matin à New York, où il réside, par téléphone et s'est cru victime d'une «
blague perverse ». En effet, l'auteur était loin d'être favori avec une cote de 25 contre un chez les « bookmakers » britanniques. Il est ensuite allé se promener à Central Park avant de tenir une conférence de presse, où il a remercié l'Espagne et l'agent littéraire Carmen Balcells.
L'écrivain s'apprête à publier en Amérique latine Le songe du celte, qui paraîtra chez Gallimard, son éditeur français, en 2011. Le livre est consacré au diplomate et activiste Roger Casement qui dénonça les atrocités commises dans le Congo de Léopold II. La maison de la rue Sébastien Bottin vient aussi de publier un livre d'art sur l'auteur, Mario Vargas Llosa, la liberté et la vie, à l'occasion de l'exposition qui se tient actuellement, et jusqu'au 6 novembre à la Maison de l'Amérique latine.
Un réalisme magiqueRomancier, poète, essayiste, son oeuvre, d'inspiration historique aux formes narratives innovatrices - le réalisme se mélange à la magie -, comporte des livres majeurs comme La ville et les chiens, Les caïds, Les chiots, Conversation à la Cathédrale, La fête au bouc ou encore La maison verte.
Sartrien « intoxiqué de littérature française », il a préfacé Anthologie de la nouvelle latino-américaine contemporaine et rédigé un Dictionnaire amoureux de l'Amérique latine (Plon), tout en s'intéressant à Flaubert, Victor Hugo et Borges pour différents essais.
Vargas Llosa a aussi co-réalisé la première adaptation cinématographique de son roman Pantaléon et les visiteuses. Un autre de ses livres, La tante Julia et le scribouillard, avait fait l'objet d'une adaptation hollywoodienne, qui avait reçu deux prix au Festival de Deauville.
Parmi ses multiples prix, il a reçu 40 titres de docteur Honoris Causa (dont trois en France), la Légion d'honneur (en 1985) et de multiples prestigieuses récompenses comme le prix Prince des Asturies, le Prix Cervantes, le Prix Planeta, le Prix de la Critica, le Prix Romulo Gallegos ou le Prix Leopoldo Ala.
Un engagement brouillé
Ecrivain engagé, il a reçu le prix Nobel pour « sa cartographie des structures du pouvoir et ses images aiguisées de la résistance de l'individu, de sa révolte et de son échec ». « Il considère qu'un auteur ne doit pas simplement distraire », a commenté le secrétaire de l'Académie suédoise Peter Englund.
Si à l'origine son combat politique l'a amené à soutenir la révolution de Fidel Castro, il s'est de plus en plus détaché des politiques totalitaristes pour devenir un représentant d'une certaine forme de néolibéralisme depuis les années 70.
à travers ses éditoriaux dans El Pais, on le sent plus proche de l'instinct politique de Berlusconi que des chefs d'états bolivien, argentin ou vénézuélien. Antimilitariste, libertaire, non conformiste, il a lui même tenté l'aventure présidentielle au Pérou en 1990 avec le parti de droite du Front démocratique. Suite à cet échec, il a migré en Espagne où Felipe Gonzales lui a accordé la double citoyenneté, ce qui vaut aux deux pays une dispute diplomatique sur la nationalité du prix Nobel.
Vargas Llosa est un globe-trotteur. Il a résidé en Bolivie, au Pérou, en Espagne, mais aussi à Londres, sa ville préférée, et à Paris. « Mes sept années parisiennes furent les plus décisives de ma vie. C'est là que je suis devenu écrivain, que j'ai découvert l'amour passion dont parlaient tant les surréalistes, là où j'ai été plus heureux, ou moins malheureux, que nulle part ailleurs (...). Je n'exagère pas si je dis que j'ai passé toute mon adolescence à rêver de Paris » confesse l'écrivain.
Dans un récent entretien au Nouvel Observateur, il avouait qu'il emporterait sur une île déserte quatre romans : La comédie humaine, Guerre et paix, Don Quichotte et Ulysse.