Arnaud Guillon a pris son temps. Sept ans après la publication de son dernier livre, un recueil de nouvelles, Hit-parade (Plon, 2007), le revoici enfin en librairie. Chez Héloïse d’Ormesson, l’auteur d’Ecume palace (Arléa, 2000, prix Roger-Nimier) signe un Tableau de chasse où se déploie toute sa finesse de trait. Lorsque le rideau s’ouvre, Manon et Vincent partent en week-end au bord de la mer. La jeune femme travaille dans une galerie, le jeune homme dans une agence d’architectes. Leur couple connaît des tensions depuis un moment et semble avoir pas mal de plomb dans l’aile. Pour l’heure, le temps d’un week-end, les voici qui prennent le chemin de la Normandie et de l’élégante villa Dalila.
La maison des parents de Vincent, celle où a grandi le petit garçon aux yeux bleus et aux cheveux noirs qu’il était jadis, donne sur la Manche. Jean et Claire Lavigne les accueillent comme il faut. Le programme des réjouissances comprend champagne, Saumur-Champigny, bar au fenouil, tennis, baignade et lecture d’un roman de Dickens. Au tableau s’ajoute bientôt la présence d’un vieil ami de la famille, Eric. Lequel a tant aidé à remettre la villa au propre quand Jean en a hérité.
Le bonhomme a le regard vif, le verbe haut, il régale l’assemblée de ses anecdotes. Eric succombe d’emblée à la beauté de Manon, à ses cheveux sombres, sa peau mate et ses yeux marron. Une Manon qui a compris instantanément qu’elle était totalement sous le charme de l’invité surprise. Quand Vincent doit reprendre le chemin vers Paris, Manon, elle, décide de prolonger le séjour. A l’instar d’Eric…
Depuis Daisy, printemps 69 (Plon, 1998), Arnaud Guillon n’a cessé de prouver qu’il est maître dans l’art du feutré, de la demi-teinte. Derrière la petite musique se cache le drame. Qui vient projeter les protagonistes et les lecteurs de Tableau de chasse dans une tout autre réalité. Al. F.