Il a été croqué par Norman Mailer et a publié ses mémoires, sous l'œil de Toni Morrison. Mohamed Ali est un mythe toujours aussi inspirant. Une histoire comme l'Amérique les aime. Soit la revanche d'un paria adulé par le monde entier, qui s'est érigé en symbole à la force de ses poings. Journaliste et écrivaine, Judith Perrignon poursuit son œuvre de portraitiste. Au départ, elle lui a consacré « La grande Traversée », série d'été sur France Culture, mais ici elle a voulu mettre ses mains dans l'argile qui le constitue. Son nom d'origine est Cassius Clay (l'argile), fils d'un peintre frustré et violent, qui l'a élevé dans la chrétienté. Il rêve très tôt de s'imposer sur le ring. En 1964, il est sacré nouveau champion du monde, à 22 ans. Le rebelle se transforme dès lors en « seigneur de la boxe ».
Pendant ce temps, la guerre du Vietnam, les combats de Martin Luther King ou Malcolm X font rage. Ali devient l'ami de ce dernier, tout en revendiquant son appartenance au mouvement Nation of Islam. Il change de nom et brandit une identité d'Afro-américain musulman. Ainsi, il affirme : « J'aime l'Amérique, mes ancêtres ont été lynchés, brûlés, mais nous aimons l'Amérique, nous avons fait l'Amérique. » A travers le parcours de cet homme, susceptible de se relever après les chutes, on revisite la réalité sociopolitique de ce pays.
Judith Perrignon change de ton en fonction des personnalités traitées. Elle a fouillé les archives, papiers ou sonores du FBI, épluché un vieux numéro de Playboy ou rencontré ceux qui ont pu croiser sa route. Ce puzzle, peuplé de tête-à-tête, laisse deviner les blancs de l'histoire. Comme le dit l'un des témoins « son ultime héritage, ça a été de rendre les gens courageux ».
L'insoumis : l'Amérique de Mohamed Ali
Grasset, France-Culture
Tirage: 4 000 ex.
Prix: 20,90 euros ; 260 p.
ISBN: 9782246820895