C'est un petit texte surgi comme une urgence, glissé in extremis dans le flot des romans de l'automne, un post-scriptum à la rentrée littéraire. Emmelene Landon publie le 22 novembre Marie-Galante, chez Gallimard. Un dernier message d'amour à son époux, Paul Otchakovsky-Laurens, mort le 2 janvier dernier dans un accident de la route à Marie-Galante, la petite île au sud de la Guadeloupe. Ce n'est pas un livre de déploration, c'est la chronique d'un bonheur. Il résonne à la manière de la magnifique Lettre à D., adressée à son épouse douze ans plus tôt chez Galilée par le philosophe André Gorz avant leur suicide ensemble.

Le bonheur, avec Emmie et Paul, c'est simple comme une conversation. Un coup de fil, un texto, des mots, des regards, des photos échangés. L'artiste peint, écrit, traduit, filme aussi, comme lui. L'éditeur préfère qu'on voie ses films « plutôt que de les lire dans un livre ». Surtout, il lit. Il « construit sa vie autour de la lecture. Il en a fait son métier, choisissant de publier parmi des manuscrits que des écrivains lui envoient par la Poste ceux qu'il aime ». Du premier séjour du couple à Marie-Galante, en décembre 2016, au second, en décembre 2017, Emmelene Landon raconte, restitue ses échanges, en tout lieu, à tout moment, côte à côte, face à face ou à distance, plusieurs fois par jour. Et dans ce mouvement, elle livre du métier de ce grand éditeur à la vie « extrêmement remplie », la clé ultime.

Pour P.O.L., qui ne manquait pas d'humour, « la retraite, jamais. Plutôt me faire venir en chaise roulante pour de fausses réunions, comme Bourguiba ». De Marseille à Montréal, de Francfort à Cannes ou à la maison familiale de Nyons, il voyage autant que sa pensée. Emmie et lui ont d'ailleurs inventé les « Wind Films », « des films libres, comme des esquisses, réalisés, joués et montés ensemble ». Nul ne pourra contester que, comme lui, « tous les livres [qu'il] publie sont vivants, c'est comme s'ils avaient du vent dans les cheveux ».

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