Les barbares nous attaquent parce qu’ils nous croient faibles. L’opinion de Nicolas Sarkozy est-elle juste ? Qu’entend-on par barbares ? N’ont-ils attaqué que des faibles ? La lecture de l’imposant volume dirigé par Bruno Dumézil (université Paris-Ouest Nanterre La Défense) répondra thématiquement et alphabétiquement à toutes les curiosités. Sur la notion historique de barbare et sur la diversité de ces peuples qui ont fait peur d’abord par l’ignorance que nous en avions, puis par les fantasmes qui sont venus se greffer sur cette ignorance.
Car le barbare n’est pas que l’autre. Il est l’autre différent, celui qui vit ailleurs. Il est poilu, pue un peu, exhibe son corps, mange n’importe quoi et communique par une langue faite de "bar-bar-bar" incompréhensibles. Des borborygmes, quoi ! C’est pourquoi la barbarie s’oppose à la civilisation. Elle implique des frontières, plus ou moins nettes, et des dates fluctuantes. Cet ouvrage collectif ne prétend pas définir "le" barbare, personnage insaisissable, nous dit Bruno Dumézil, mais explore l’histoire des peuples considérés comme "des" barbares et les usages de ces représentations. Pour cette vaste enquête sont convoqués la philosophie, l’anthropologie, la sociologie, le droit, la linguistique, tout ce qui permet de comprendre le concept de "barbarie". On voit alors la limite du barbare comme celui qui s’en prend à plus faible que lui et la richesse de ce livre placé sous la sagesse de Montaigne : "On appelle barbarie ce qui n’est pas de son usage."
Laurent Lemire