Le Président-directeur général et directeur du Point, s’appelle Franz-Olivier Giesbert, alias FOG. Membre du jury Renaudot, il passe pour être « faiseur de prix ». Il aime d’ailleurs qu’on le sache. Vous trouverez à qui parler, mon gaillard. Le Point compte parmi ses chroniqueurs Patrick Besson, membre du jury Renaudot, auteur cette rentrée de Belle-sœur (Fayard). FOG consacre donc une page de son journal à dire le bien qu’il pense de cette Belle-sœur . Les journaux sont de grandes familles. Pour cette raison, d’ailleurs, Le Point du 13 septembre ne nous rappelle pas que Patrick Besson est un collaborateur de l’hebdomadaire, ainsi qu’un co-juré. Car tous les lecteurs le savent, mon pauvre ami ! Les lecteurs sont aussi une grande famille. Entre beaux-frères, belles-sœurs, cousins et parrains, plein de choses vont sans dire. Ce qui va en le disant, c’est l’éloge : « Besson est arrivé au sommet de son art » (faut-il dès lors prévoir un déclin ?). S’étant mis lui-même au défi d’égaler Patrick, FOG montre qu’il touche à son tour les sommets : « Peine à jouir, s’abstenir. En lisant vous entendrez notre ami, si vous tendez bien l’oreille, égrener derrière chaque ligne, ce rire si particulier, un peu mélancolique, qui le précède partout ». Cette jouissance auriculaire, c’est magique comme l’Annonciation quand l’Ange murmure à l’oreille de Marie. Essayez, tendez bien votre oreille de prêt-à-jouir : vous entendrez un rire s’égrener derrière une ligne. Surtout si c’est au moment où le char de l’Etat navigue sur un volcan. Après quoi – porté par l’érotisme intrinsèque aux métaphores – le président-juré vous remet ça, sinistres peine-à-jouir : « Besson a tant de baisers à raconter – soit dit en passant, il en raconte un si bien qu’il vous met l’eau à la bouche – et d’autres choses aussi ». Ah, les belles histoires du cousin Patrick ! Il a de la chance, le cousin Pat. Il est aussi chroniqueur au Figaro Magazine , et toujours juré Renaudot. Ça vaut bien un double page dans l’édition du 15 septembre. Il l’occupe en copropriété avec Eric Neuhoff ( Pension alimentaire , Albin Michel), rédacteur en chef des pages « Livres » de Madame Figaro . Tout le Figaro d’un coup, c’est économique. La copropriété Neuhoff /Besson s’assortit-elle d’un droit de jouissance ? Il faut le croire puisque, très finement, la photo représente l’auteur de Belle-sœur et celui de Pension alimentaire dans le même lit, et dans de beaux draps. A l’hôtel Lancaster, précise-t-on. FOG a été entendu jusqu’au Fig : nous sommes dans un monde où il n’y a décidément pas de peine-à-jouir. Comme disent les routiers et les copains du cousin Pat : nous, au moins, on est pas des gonzesses, non mais ! Même chez Madame Figaro , on est pas des gonzesses. On est un groupe de super mecs, ainsi que nous le rappelle le FigMag : « Les points communs [des « frères amis »] ne se comptent plus. Les prix littéraires, la presse, le goût des femmes, les divorces, les enfants, la passion de Paris en général et du VII° arrondissement en particulier, le vin, les quatre cent coups, comme ce voyage à New York en 1986 organisé par feu Frédéric Berthet, alors attaché culturel à l’ambassade ». Whisky, cigarettes et p’tites pépés aux frais du contribuable. Abus de position dominante aux dépens des éditeurs. Un modèle pour tous. Je fais confiance à la critique de mon pays. Et la Belle sœur pas peine-à-jouir dans tout ça ? Le Figaro Magazine en parle aussi. L’Esprit de FOG, là encore, flotte sur les eaux : « L’analyse de l’amour du héros – dont le frère cadet est un acteur de cinéma beau comme un dieu – pour sa belle-sœur Annabelle est d’une justesse quasi-stendhalienne [pourquoi quasi : stendhalienne, bon sang, n’hésitons pas : stendhalienne !]. C’est un roman sur ce qui est, ce qui serait, ce qui sera ». On commence Stendhal et cela monte au sommet de l’art dont parlait FOG : on approche Yahvé que l’on entend tel que dans la Genèse. Ce qui est, ce qui serait, ce qui sera…De l’Annonciation du Point au Buisson Ardent du FigMag , les « frères amis » sont bibliques. Manquerait plus qu’ils deviennent Caïn et Abel. Non. Tout s’est bien passé dans le lit du Lancaster, si l’on en croit la fin de l’article. Il sortent aussi virils et bons copains qu’ils sont entrés. Pull en coton sur les épaules de Patrick. Veste de tweed sur celles d’Eric. « Il est presque midi [c’est l’heure pour rendre les chambres]. Un soleil andalou, pour la première fois depuis des semaines, caresse Paris. L’air est sec comme le Veuve Clicquot bien frappé qu’ils vont boire comme jadis, dans un café des Champs-Élysées ». Nous ne quittons pas la Bible. Il y a même une chute.
15.10 2013

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