Le gouvernement américain a réclamé mardi en justice la saisie des recettes de l'autobiographie du lanceur d'alerte Edward Snowden, sortie le même jour, et des revenus qu'il tire de ses interventions publiques. Mémoires vives paraît en France au Seuil cette semaine. Sur Amazon.com, le livre est déjà en tête des ventes, tous genres confondus.
Les Etats-Unis ont déposé plainte au civil pour "violation de contrat" contre cet ancien employé de la CIA et ex-contractuel de l'agence de renseignement NSA, exilé en Russie depuis qu'il a dénoncé en 2013 la surveillance massive des communications et de l'internet dans son pays.
Violations selon le gouvernement
L'ancien informaticien de 36 ans est déjà inculpé au pénal d'espionnage et de vols de secrets d'Etat. Mais cette fois, le gouvernement américain souhaite lui couper les vivres.
"Nous ne permettons pas à des individus de s'enrichir aux dépens des Etats-Unis", a commenté Jody Hunt, haut responsable au ministère de la Justice, citée dans un communiqué. Son livre et ses discours ont causé du tort aux Etats-Unis "en érodant la confiance envers la CIA et la NSA" alors que "Snowden s'est injustement enrichi dans le processus", peut-on lire dans cette plainte. Il demande au tribunal de prononcer une injonction en urgence pour empêcher ses éditeurs américains de lui transférer des fonds.
Dans la plainte, déposée devant un tribunal fédéral d'Alexandria, près de Washington, le gouvernement lui reproche d'avoir publié un livre contenant des informations sur la CIA et la NSA "sans avoir soumis le manuscrit" à ses anciens employeurs en violation des clauses de confidentialité de ses contrats de travail.
Le gouvernement reproche également à Edward Snowden d'avoir prononcé ces dernières années plusieurs discours rémunérés sans l'aval de ses anciens employeurs, toujours en violation de ses engagements.
En guise de dédommagement, le gouvernement réclame l'ensemble des revenus tirés de l'autobiographie d'Edward Snowden et d'éventuelles adaptations cinématographiques, ainsi que les sommes touchées pour ses interventions publiques.
Réactions de l'auteur
"C'est dur d'imaginer une meilleure attestation d'authenticité qu'une plainte du gouvernement américain", a réagi Edward Snowden sur Twitter. Sur ce réseau, il a publié régulièrement toute la nuit différentes réactions à cette décision.
De son côté, la puissante organisation de défense des libertés ACLU a volé au secours du lanceur d'alerte. "Le livre ne contient aucun secret gouvernemental qui n'ait pas déjà été publié par des médias respectés", a estimé Ben Wizner, directeur des questions de technologies et de droits.
Nombreux, sur Twitter, ont vu dans cette plainte une nécessité de lire le livre, certains avec ironie en se moquant du gouvernement qui offre une promotion gratuite au document et une validation des informations des lanceurs d'alerte. Certains rappellent aussi le mauvais signal envoyé une semaine avant l'opération annuelle "Banned Books Week" (Semaine des livres censurés).
Sur France Inter, dans un entretien exclusif lundi matin, Edward Snowden a réclamé l'asile à la France.