L’idée d’Etats généraux de la bande dessinée, lancée quelques mois plus tôt par les auteurs Benoît Peeters, Denis Bajram et Valérie Mangin, entendait répondre au malaise exprimé lors du dernier festival Quai des bulles, à Saint-Malo, par les auteurs qui s’inquiètent d’une hausse programmée au 1er janvier 2016 de leur participation au Régime des auteurs et artistes professionnels (Raap, retraite complémentaire), en élargissant la réflexion à l’ensemble des défis posés par les transformations du marché de la bande dessinée.
Constitués en association présidée par Benoît Peeters, avec Denis Bajram comme secrétaire et coordinateur général et Valérie Mangin comme trésorière, les Etats généraux se sont dotés d’un site internet et d’un comité de parrainage d’une douzaine d’auteurs (Pénélope Bagieu, Nicolas Barral, Philippe Dupuy, Daniel Goossens, Emmanuel Lepage, Serge Le Tendre, Wilfrid Lupano, Frank Margerin, Ralph Meyer, Marion Montaigne, Arthur de Pins, Jeanne Puchol et la coloriste Isabelle Rabarot).
Les auteurs ont été rejoints par les organisations et syndicats d’auteurs et les sociétés de gestion collective de leurs droits (SGDL, Conseil permanent des écrivains, SNAC BD, adaBD, ADAGP, Scam, Saif, Sofia…), les éditeurs du groupe BD du Syndicat national de l’édition et du Syndicat des éditeurs alternatifs (Sea) tout juste créé par une quarantaine de petites maisons et présidé par Jean-Louis Gauthey (Cornélius), le Syndicat des libraires de France, la Cité internationale de la bande dessinée et de l’image, la Bibliothèque nationale de France et le Festival international de la bande dessinée d’Angoulême, dont la plupart étaient représentés à la réunion d’Angoulême où chacun a expliqué le sens de son engagement.
Etaient également présents au lancement des EGBD, le Raap. le service du livre du ministère de la culture représenté par son directeur, Nicolas Georges, qui a assuré que le ministère prendrait le temps de discuter du règlement du conflit sur la retraite complémentaire des auteurs, et le Centre national du livre dont le président, Vincent Monadé, a promis qu’il accompagnerait financièrement le processus des Etats-Généraux.
“Nous voulons essayer de comprendre les mutations depuis vingt ans de ce métier passé du monde de la presse à celui du livre, avec une production passée de 700 albums en 1994 à 5000 en 2014, mais aussi une diminution du tirage car les ventes n’ont pas progressé dans les mêmes proportions“, a expliqué Benoît Peeters, pour qui il ne faut pas pour autant “s’imaginer que les éditeurs sont les ennemis des auteurs“.
Pour le président des EGBD, “la BD se porte bien artistiquement, mais beaucoup moins économiquement. Les auteurs sont précarisés, les éditeurs fragilisés, les libraires débordés, les lecteurs désorientés“, mais “il y a des possibles ; nous croyons tous à cet art né vers 1830 avec Töpffer“.
Le processus des états généraux se déroulera en deux temps dont le premier consacré à la réalisation d’un état des lieux fondé sur des études scientifiques et à l’alimentation par tous ceux qui le souhaitent de cahiers de doléances, et le second à la formulation de propositions, a précisé Denis Bajram. Le secrétaire des EGBD a annoncé qu’un conseil scientifique des études avait été constitué avec les historiens spécialistes de la bande dessinée Thierry Groensteen et Pascal Ory, les sociologues Nathalie Heinich, Bernard Lahire et Pierre Nocero (secrétaire du conseil scientifique), l’économiste Thomas Paris et le directeur du Musée de la bande dessinée d’Angoulême, Jean-Pierre Mercier.
Devant une salle dans laquelle les auteurs se sont montrés bien plus sages que quelques mois plut tôt à Saint-Malo, dix études ont été annoncées: recensement et cartographie des auteurs ; marché de la bande dessinée ; formation des auteurs ; lecture ; libraires et diffuseurs ; numérique ; place de la BD parmi les biens culturels ; de la collection au marché de l’art ; festivals et salons ; mobilisation des auteurs.