La salle était pleine à l'hôtel de Massa, à Paris, mardi 20 octobre, pour le forum annuel de la Société des gens de lettres (SGDL) sur le thème “La révolution numérique de l'auteur”.
“Il revient à nos éditeurs de nous assurer de justes conditions de rémunération, aussi souples que le média concerné, et susceptibles d'évoluer en période expérimentale, au moins jusqu'à ce qu'un modèle économique finisse par s'imposer”, a déclaré en préambule le président de la SGDL, Alain Absire.
A la première table ronde de la matinée, “L'auteur face à de nouveaux éditeurs”, Marie Desplechin a expliqué comment elle avait écrit sur commande La belle Adèle pour SmartNovel, une toute jeune maison d'édition qui publie des romans-feuilletons pour téléphones portables.
“Je ne vois pas de différence avec d'autres commandes que j'ai eues par ailleurs, a expliqué l'écrivaine. La consigne était de réaliser 35 épisodes de 4 000 signes, avec une intrigue : c'est le principe du feuilleton traditionnel. Je ne vois dans le numérique ni menace, ni révolution, en revanche j'y vois un outil amusant et très excitant pour l'imagination.”
De son côté, Virginie Clayssen, responsable du numérique chez Editis et présidente de la commission numérique du SNE, estimait que les nouveaux supports ne modifiaient pas “la partie fondamentale de nos métiers, sauf en aval, dans la relation avec le lecteur.”
Cependant, depuis la salle, de nombreux auteurs se sont étonnés d'un “conservatisme” des éditeurs à la tribune, réagissant vivement à cette “soi-disant continuité entre l'imprimé et le numérique”, et s'inquiétant d'un monde où “les oeuvres se retrouvaient fragmentées et éclatées”, sans qu'il y ait de contrat ni de rémunération spécifiques.
Ce à quoi Alain Absire, très consensuel, a rétorqué que les éditeurs acceptaient peu à peu l'idée d'avenants pour les droits numériques, avec une durée limitée à cinq ou dix ans, et non pas pour toute la durée de la propriété intellectuelle.
En clôture de la journée, la secrétaire d'Etat à la prospective et au développment de l'économie numérique, Nathalie Kosciusko-Morizet a encouragé les professionnels présents à aller de l'avant : « Internet est un média de l'offensive, a-t-elle rappelé. Si on reste sur la défensive, on a perdu d'avance. » Interrogée sur les relations entre la BNF et Google, elle a estimé que « c'était le bon moment pour négocier, car pour Google, la BNF est une princesse », ajoutant : « Ne pas le faire, c'est mettre les bijoux de famille au Mont-de-Piété. »