Certains somatisent, telle Dorothée : « J'ai le goût d'y aller et en même temps je suis inquiète : et quand je suis inquiète, je me gonfle de partout, et mes plumes se dressent sur ma tête. » D'autres ne sont plus sûrs de rien, comme Isadora : « On est vraiment obligés d'y aller ? Mais pourquoi donc ? » Quant à Emile, il doute sacrément : « Je doute, je doute et je doute. Faut absolument que j'arrête de me répéter ça en boucle. » D'autres se rengorgent, fiers comme des paons. Ainsi Jean-Paul : « Attention, attention ! Poussez-vous de là, j'arriiiiiiiiive ! » Dans ce merveilleux leporello, toutes plumes dehors, chaque oiseau se prépare pour le grand jour et livre une petite pensée sur son état d'âme avant le grand jour : joie, peur, impatience, manque de confiance en soi, hésitation, concentration... Ils sont tous là, sur la ligne de départ, tremblant, frétillant, piaffant, roucoulant ou se pavanant, les Zacharie, les Yvette, les Xavière, les Boubacar. De drôles d'oiseaux imaginaires, avec leurs dégaines rigolotes, leurs plumes chatoyantes, leurs airs bravaches ou contrits. Natali Fortier les croque avec ses crayons de couleur magiques. Son dessin est à la fois délicat et brut. Une simple expression de regard, une attitude corporelle en disent long sur le sentiment qui les anime avant l'épreuve. Mais peu importe la trouille ou le doute, à la fin tout ce beau monde, poltron ou fanfaron, se lance et trouve sa place dans l'envolée collective. Que ce soit Victoire, parfumée à l'eau de rose pour l'occasion, ou Rita qui chante du Charles Trénet pour se donner du cœur à l'ouvrage, ou encore Oscar qui attend que sa Paulette soit prête, chacun, à la fin, s'envole bel et bien en l'air. Fabienne Jacob