Le Syndicat de la librairie française (SLF), le Syndicat des distributeurs de loisirs culturels (SDLC) et la Fnac ont exprimé, ce lundi 20 octobre, dans un communiqué commun, leur « vive inquiétude » après l’annonce d’Amazon de proposer une remise de 5 % sur les livres neufs livrés en « point de retrait éligible », c’est-à-dire les 3 000 casiers automatiques du géant de l’e-commerce, situés dans des commerces qui vendent des livres.
Pour ces acteurs majeurs du secteur, cette initiative constitue « une manœuvre commerciale qui contrevient à la loi sur le prix unique du livre et fausse la concurrence entre détaillants du livre ». Sous couvert de faciliter « l’accès à la lecture dans les territoires », Amazon contournerait selon eux le cadre légal fixé par la loi Lang de 1981. Celle-ci autorise en effet une remise maximale de 5 % et la gratuité des frais de port uniquement pour les commandes retirées « dans un commerce de vente au détail de livres ». Or, dénoncent les signataires, « Amazon contourne purement et simplement le cadre légal en assimilant ses casiers à de tels commerces ».
Une pratique jugée illégale
Les syndicats rappellent d’ailleurs que le médiateur du livre, saisi à deux reprises sur ce sujet par la ministre de la Culture, a rendu deux avis affirmant le caractère illégal de cette pratique. Interrogé par Livres Hebdo en mai dernier, Jean-Philippe Mochon avait ainsi déclaré : « On n’est plus dans la flexibilité de la loi, mais bien au-delà. Tout simplement parce que quand vous retirez un livre dans un casier automatisé, même si le casier est implanté dans la galerie marchande d'un supermarché, ce n'est pas un retrait dans le supermarché, il n’implique aucune interaction avec ce dernier ».
Les trois organisations soulignent également que le prix unique du livre, pierre angulaire de la politique culturelle française, « vise à garantir la diversité culturelle, la concurrence équitable et la vitalité du marché du livre ». « Toute remise, même encadrée, doit respecter cet équilibre fragile, préviennent-ils. Sous peine d’appauvrir la dynamique d’offre de livres, dans un contexte où la pratique de la lecture recule de manière préoccupante, notamment chez les plus jeunes ».
Dans leur communiqué, ils fustigent également une politique s’apparentant à du « dumping, visant à capter des parts de marché en faussant la concurrence à son profit », alertant ainsi sur une « distorsion de concurrence » qui, loin de profiter aux acheteurs, « affaiblira l’ensemble de l’écosystème du livre, notamment les auteurs et les éditeurs ».
Le médiateur saisi
Face à ce qu’ils qualifient d’« offensive inacceptable », le SLF, le SDLC et la Fnac affirment leur détermination à agir. Ils annoncent avoir déjà saisi le médiateur du livre pour « une conciliation préalable à un recours contentieux » et appellent les pouvoirs publics à se saisir de ce dossier.
Et de conclure : « Cette nouvelle étape franchie par Amazon renforce notre détermination à mobiliser tous les moyens de recours juridiques pour contraindre la multinationale américaine à exercer son activité dans le strict respect du cadre légal français. »