Le CPE, de la coordination à la négociation permanente

Marie Sellier. En 2012, son arrivée à la présidence du CPE en même temps que celle de Vincent Montagne à la tête du SNE, tous deux décidés à obtenir des compromis, ont permis de sortir de l’impasse. - Photo Olivier Dion

Le CPE, de la coordination à la négociation permanente

Créé en 1979 et à l’origine du premier code des usages dans l’édition, le Conseil permanent des écrivains rassemble 18 associations, syndicats ou sociétés d’auteurs.

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Par Hervé Hugueny,
avec Créé le 18.05.2018 à 01h48

Organisateur des états généraux du livre, mardi 22 mai, le Conseil permanent des écrivains (CPE) est redevenu le représentant légitime et reconnu des auteurs de l’écrit dans leurs relations avec les pouvoirs publics et les éditeurs. Créé en 1979, présidé depuis l’an dernier par l’historien Pascal Ory, il ne compte pourtant ni permanents, ni adhérents individuels. Mais, hébergé par le Syndicat national des auteurs et des compositeurs (Snac), rue Taitbout à Paris, il rassemble 18 associations, syndicats ou sociétés d’auteurs, y compris de gestion de droits, de sensibilités très diverses.

"L’objectif était de créer une sorte de bureau de liaison, une coordination entre les différentes composantes représentant les auteurs de l’écrit", explique Emmanuel de Rengervé, délégué général du Snac et trésorier du CPE. La composition du bureau recoupe celle de ses composantes les plus actives, ou disposant de permanents pour s’y faire représenter (Charte des auteurs et illustrateurs jeunesse, Saif, Snac BD, Scam, SGDL).

Le chantier fondateur du CPE a été celui du "Code des usages en matière de littérature générale", négocié en 1979-1980 avec le Syndicat national de l’édition (SNE), qui a notamment abouti à la suppression de la "passe", une amputation systématique de 10% des droits d’auteur, se souvient Yves Frémion. Aujourd’hui retraité, celui-ci est toujours délégué du Self au CPE, où il est présent depuis l’origine et qu’il a présidé pendant six ans, jusqu’en 2007. Le Conseil avait fait aussi entendre la voix des auteurs lors de la discussion de la loi sur le prix du livre en 1981, négocié un abattement fiscal sur les droits d’auteur (supprimé en 2001), participé à l’instauration du droit de reprographie, discuté de la retraite complémentaire et de la rémunération au titre du droit de prêt. Mais, dans les années 1990, des dissensions sont apparues. Plusieurs adhérents ont pris leurs distances, notamment la SGDL, avant de reprendre contact au début des années 2000.

Obtenir des compromis

L’irruption du numérique a véritablement relancé le Conseil au milieu des années 2000. Initiées par la SGDL, les négociations sur les droits numériques avaient piétiné, jusqu’à ce qu’il apparaisse judicieux de remettre le CPE dans la boucle. Ainsi regroupés, les auteurs ont reconquis une visibilité médiatique. Le ton des communiqués est monté. La prolongation de la mission de Jean-François Sirinelli, chargé de conduire le groupe de travail entre auteurs et éditeurs, les fermes consignes d’Aurélie Filippetti, ministre de la Culture en 2012, et l’arrivée la même année de Marie Sellier à la présidence du CPE et de Vincent Montagne à celle du SNE, tous deux décidés à obtenir des compromis, d’abord dans leur organisation respective, ont permis de sortir de l’impasse.

La signature de l’accord-cadre sur le contrat d’édition à l’ère du numérique le 21 mars 2013 par Marie Sellier et Vincent Montagne a donné sa légitimité actuelle au CPE. A contrario, la numérisation des livres indisponibles, dossier sur lequel le Conseil est resté silencieux faute de consensus, a abouti en 2012 à une loi contestée avec succès par une poignée d’auteurs.

Les accords récents autour des compensations intertitres, des provisions pour retour ou encore d’un modèle de reddition des comptes ont conforté le caractère permanent du rôle du Conseil. La remise en cause de l’équilibre actuel du droit d’auteur par la Commission européenne oblige aussi les éditeurs à resserrer les rangs avec les auteurs pour constituer un front commun.

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