Édito par Fabrice Piault, rédacteur en chef

Photo PHOTO OLIVIER DION

L’ambitieuse étude sur les auteurs de bande dessinée dont nous livrons cette semaine les résultats lance une intense période de réflexion sur les conditions de vie, de travail et de rémunération des auteurs. Pas moins de cinq autres études sont en cours, que le ministère de la Culture rendra publiques mi-mars, pour Livre Paris. Au final, on devrait bientôt disposer du panorama de la condition de l’auteur le plus détaillé depuis le travail réalisé il y a dix ans par Bernard Lahire sur La condition littéraire : la double vie des écrivains (La Découverte, 2006).

Il est vrai que, si essentiels qu’ils soient à la chaîne éditoriale, les auteurs en constituent finalement le maillon le moins connu, du moins pour ce qui concerne leurs conditions matérielles d’existence. Au-delà, l’étude commanditée par les Etats généraux de la bande dessinée pose des questions de fond sur la nature d’une activité pratiquée de façons extrêmement diverses par des créateurs qui ne sauraient correspondre à un modèle unique. Partagés entre de multiples catégories d’amateurs et de professionnels à temps plus ou moins complet, un peu comme les sportifs, ils déjouent les tentatives de définition d’un métier. Cela explique dans une large mesure les difficultés à organiser leur protection sociale, quand ce n’est pas leurs conditions contractuelles et de rémunération, sur lesquelles ils mènent depuis plusieurs mois avec les éditeurs des négociations que les deux parties s’accordent à juger constructives.

De fait, et c’est peut-être la plus grande surprise de l’étude sur les auteurs de BD, plus des deux tiers d’entre eux jugent leurs relations avec leurs éditeurs bonnes ou même très bonnes. Alors que le droit d’auteur fait actuellement l’objet de tant de remises en cause en Europe et en France, les uns et les autres sont convaincus de son rôle structurant pour les industries créatives. Si le droit d’auteur "peut paraître inactuel à certains, c’est seulement parce qu’il pose une limite à la démesure commerciale des grandes entreprises du numérique ou à des ambitions politiques peu soucieuses de culture", rappelle le P-DG de Madrigall, Antoine Gallimard, en introduction au combatif dossier que la revue Le Débat consacre au droit d’auteur (n° 188, janvier-février 2016). "Il y a, ajoute-t-il, des propriétés immatérielles qui méritent d’être défendues pour elles-mêmes comme pour le bien de tous."

29.01 2016

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