Gaëlle Bantegnie avait opéré une entrée réussie avec France 80 (Gallimard, "L'Arbalète", 2010). Un coup d'essai mettant en scène deux personnages issus de la classe moyenne : une adolescente, Claire Berthelot, et un technico-commercial, Patrick Cheneau. Elle nous revient avec Voyage à Bayonne, qui se déroule à la fin de la décennie suivante et compte deux protagonistes.

Emmanuelle Constantin et Boris Duval vivent ensemble depuis plus de deux ans et partagent un lit de 140 dans un T3 à Angers. Emmanuelle a 25 ans, enseigne la philosophie à des terminales S au lycée Olympe-de-Gouges. Cette jeune femme, qui aime la poésie d'Emmanuel Hocquard et l'émission "Questions pour un champion", a entrepris de lire Leibniz dans l'ordre chronologique, de reprendre le footing et les abdominaux.

Son quotidien vacille quand Boris lui annonce, puisque, selon ses propres mots, il se sentait "en proie à unecertaine culpabilité", qu'il a couché avec une collègue, professeure de lettres. Pour les vacances, Emmanuelle part chez ses parents qui habitent Quimper, portent des vestes Quechua et roulent dans une Peugeot 405. Au lieu d'aller visiter Pompéi, le couple prend la direction du Pays basque dans sa Clio rouge métallisé, à essence, sans climatisation ni ouverture centralisée.

Ils font escale à Vannes pour voir un ami de Boris ; à Nantes, le temps d'avaler deux parts de tartes chez belle-maman ; au Courtepaille de Niort. Leur tente à sardines, ils la plantent d'abord à Tarnos-Plage, dans les Landes, à dix kilomètres de Bayonne. Sauf qu'Emmanuelle a de plus en plus l'impression d'être suivie par une araignée géante aux pattes velues... Gaëlle Bantegnie affine la formule de France 80, multipliant les détails et posant un regard sociologique sur une époque et des personnages apparemment normaux. Le résultat donne à nouveau un roman doux-amer, drôle et intrigant à la fois.