25 août > Histoire France

Dans la famille Bonaparte, voici le frère, Joseph (1768-1844). Thierry Lentz parvient à nous rendre attachant ce personnage présenté le plus souvent comme falot. Pourtant, cet homme mesuré qui se laissa emporter par la violence politique sous la Révolution fut deux fois roi, de Naples (1806-1808) puis d’Espagne (1808-1813), après une guerre terrible dont on retrouve la violence dans les dessins de Goya.

Spécialiste du premier Empire, directeur de la fondation Napoléon, Thierry Lentz reprend le dossier Joseph point par point, dans l’ordre chronologique, ce qui est le plus sage pour quelqu’un que l’on connaît finalement peu, une énigme que Napoléon qualifiait de "fils de la poule blanche", expression corse pour dire qu’il ne pense qu’à profiter en paix de ses biens. En effet, l’ombre de Napoléon ne fut jamais protectrice pour Joseph. A en croire Thierry Lentz, il n’en avait pas besoin. Il avait connu une certaine gloire, l’aisance financière et les succès féminins avant son cadet. Sans doute ce dernier s’est-il agacé un temps de cette antériorité, jusqu’à ses conquêtes militaires et ses rêves d’une gloire à la Alexandre le Grand.

Cette copieuse biographie élégamment menée peut apparaître comme une manière d’antibiographie de Napoléon Ier. On ne parle que de Joseph pour ne pas avoir à parler de l’autre. Mais l’autre ne se chasse pas facilement. L’Empereur est toujours là au sein de l’immense fratrie. Il mésestime son grand frère, mais ne peut s’en passer. "Trop bon pour être un grand homme !" dit-il. Mais s’il l’avait considéré aussi mauvais politique, il ne lui aurait pas confié la régence en 1814 ni le gouvernement pendant la campagne de Belgique en 1815, juste avant Waterloo.

Napoléon n’avait pas de prise sur Joseph car Joseph ne demandait rien. Il n’excluait pas d’être un recours pour assurer une solution dynastique de rechange, au cas où, mais il ne sollicitait rien. Il partit en exil aux Etats-Unis, dans la région de Philadelphie, en gentleman richissime cultivant l’art de vivre à la française, puis il vint mourir à Florence comme le Machiavel qu’il ne fut pas.

Alors falot ? Sûrement pas ! Trop prudent, trop réfléchi, trop lent à la détente, peut être. Mais grâce à Thierry Lentz, il n’est plus vraiment ce frère méconnu. L. L.

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