On garde encore en mémoire les images du premier roman de Toby Barlow. Défendu par Nick Hornby et John Burnside, Crocs (Grasset, 2008) était un vrai choc. Une plongée en vers libres dans un Los Angeles peuplé de loups-garous, qui imprimait durablement sa marque.
L’Américain est enfin de retour avec le non moins étonnant et réussi Babayaga. Le décor cette fois n’est pas la Californie mais le Paris de la fin des années 1950, où le nouveau préfet de police s’appelle Maurice Papon. Voici d’abord Zoya Fominitchna Poliakov. Une créature au regard intense et au corps de rêve qui a jadis fui Saint-Pétersbourg. La dame est une sorcière qui s’en prend aux hommes aveugles et voraces.
Son dernier amant en date est un homme d’affaires peu scrupuleux. Le pauvre Léon va finir empalé sur les grilles d’un jardin public non loin de la rue Mouffetard à cause d’un sortilège mal dosé. Will Van Wyck, lui, est un type de 31 ans un peu paumé qui travaille dans la publicité et traîne dans les cocktails littéraires. C’est dans le métro qu’il va croiser Zoya. Quant à l’inspecteur Charles Vidot, il aime depuis l’enfance analyser et déchiffrer. Le policier est un homme pragmatique, "doté d’un sens stratégique aigu". Il trouve que les femmes sont "des êtres mystérieux et captivants", vénère la sienne et ne se doute pas qu’elle le trompe.
Toby Barlow s’autorise toutes les audaces, ce dont le lecteur lui est reconnaissant. Il y a du conte, de la fable dans Babayaga qui rend un fier hommage au roman d’aventures. On ne sera pas étonné d’y trouver un rat prénommé Max. Ou d’y voir Vidot transformé en insecte, obligé de sauter d’être humain en être humain, d’animal en animal pour continuer à mener l’enquête.
Al. F.