Le petit idéalise beaucoup le grand. Trop, sans doute. Il faut dire que les parents ne rechignent jamais devant les carottes du style: "Tu es encore trop petit, tu auras le droit quand tu seras grand…" Comme si être grand ouvrait un boulevard magique et infini de libertés et de possibilités en tout genre. En trente définitions, Laurence Salaün tente de cerner le grand, cet être intrigant et insondable que tous les petits rêvent de devenir un jour tout en le craignant un peu. Certaines sont pragmatiques: "Etre grand, c’est savoir que le Mercurochrome ne pique pas", d’autres paradoxales: "Etre grand, c’est porter du petit (taille S)", ou doctes:"Etre grand, c’est savoir qu’un escargot est un gastéropode (et non pas un gastro-entérologue)". Le grand est aussi cet être privilégié qui, si ça lui chante, peut manger des frites trempées dans du chocolat chaud ou encore de la banane avec du saucisson à l’ail. A lui les films de zombies et de méchants, les livres sans image et avec des caractères minuscules. A lui les risques inconsidérés. Encore que… "Etre grand, c’est être un peu prudent quand même." Chaque double page s’accompagne d’une petite anecdote illustrée de façon très amusante par Gilles Rapaport. La page intitulée "Etre grand, c’est accepter qu’on ne peut pas avoir tout tout de suite" montre un petit flanqué de son père qui toque à la porte d’une librairie en suppliant: "C’est quand le prochain Naruto ? On n’en peut plus d’attendre ! " Et la libraire de lui répondre, grincheuse: "Allez-vous en. Il est deux heures !" Fabienne Jacob