19 septembre > Essai France > Catherine Sauvat

La question n’est pas de savoir après quoi courent les poètes, mais ce qu’ils fuient. C’est bien ce que l’on ressent à la lecture de cette biographie. Catherine Sauvat insiste sur ce Rilke nomade, nomade dans ses idées, nomade dans ses amours, mais toujours au cœur des mots. Il les écrit le plus souvent dans les belles demeures de ses mécènes, comme celle de la princesse Marie de La Tour et Taxis, d’où sortent les Elégies de Duino.

Paradoxal, ce mondain qui recherche la compagnie des femmes n’aspire qu’à la solitude. Elle est la vraie maîtresse de ce fugitif, menacé par son propre sang, emporté en 1926 par une leucémie à 51 ans. Après Robert Walser (Le Rocher, 2002), Stefan Zweig (Gallimard, 2006) et Arthur Schnitzler (Fayard, 2007), Catherine Sauvat s’emploie à dévoiler celui qui est surtout connu en France pour ses Lettres à un jeune poète.

Si la forme chronologique est classique, le fond ne l’est pas. Les obsessions du poète - dont celle du silence - affleurent dans ce parcours rythmé par les amours, un mariage raté, les rencontres (Tolstoï, Rodin, Anna de Noailles) et les livres. A Paris, il rédige Les carnets de Malte Laurids Brigge où il écrit : "Le désir d’avoir sa propre mort est de plus en plus rare. Encore un moment et ce deviendra aussi rare que d’avoir une vie qui vous soit propre."

C’est cette fine mouche de Lou Andreas-Salomé, une de ses amantes, qui lui suggère de remplacer René par Rainer. Son nom devient un poème à lui seul. Un nom qui, selon Marina Tsvetaïeva, n’est pas de son époque, mais de toujours. Catherine Sauvat réussit à nous dire pourquoi. L. L.

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