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La beauté des Brontë

Anne, Emily et Charlotte Brontë, par leur frère Branwell (vers 1834). - Photo Branwell Brontë/Domaine Public

La beauté des Brontë

Mythique, la famille Brontë s’est imposée à jamais en littérature. La voici pleine de vie, de souffrance et de persévérance dans sa correspondance.

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Par Kerenn Elkaim,
avec Créé le 07.04.2017 à 01h32

"La nature humaine est pétrie d’aberrations, de contradictions et d’énigmes. Il faudrait pouvoir étudier toutes ses facettes", affirme Charlotte Brontë. Eternellement identifiée à Jane Eyre, celle-ci n’a cessé d’approcher les fêlures et la fièvre des êtres. Mais qui était-elle vraiment dans la vie ? Comment résonnait sa voix ? "Je ne suis qu’une créature de chair et de sang, mais j’aime, je vénère, j’encense la vérité." Sa forte personnalité transparaît à travers ses milliers de lettres, jamais publiées jusqu’ici en France. Autant dire un précieux trésor, savamment mis en lumière par Constance Lacroix, docteur ès langues, littératures anglaises et anglo-saxonnes, qui en a sélectionné trois cents.

Ce corpus compose le tableau d’une famille unie, foudroyée par le deuil et la maladie. A commencer par celui de la mère, qui laisse quatre enfants en bas âge lorsqu’elle est emportée par un cancer. Le pasteur Patrick Brontë est démuni, mais il parvient à insuffler beaucoup d’amour et de verve littéraire à la fratrie. Leurs plumes lyriques décrivent les difficultés du quotidien comme si on était dans un roman. Anne, Emily ou Branwell révèlent des esprits tourmentés, aux prises avec des questions existentielles. On sent tout le poids de la religion dans cette région retirée où ils ont trouvé refuge. Chacun se démène avec ses propres pensées, ses propres luttes contre le féroce Thanatos, qui les fauche dans la fleur de l’âge.

"Nos sentiments les plus intenses n’appartiennent qu’à nous - nous devons les renfermer jalousement", écrit Charlotte, qui apparaît le plus souvent. Elle dessine en creux le portrait d’une femme habitée par le sens du devoir et de la famille. Sa survie passe avant tout par "les embrasements de l’imagination qui par instants [la] consument". S’il "est permis aux femmes de réfléchir et d’avoir des Lettres", il leur est difficile de se faire publier. Une bataille dans laquelle Charlotte ne fléchit jamais. Mais ce besoin d’indépendance contraste avec son côté mélancolique, christique, solitaire, impuissant ou dépressif. "On souffre en silence tant qu’on a la force. La vie est un combat." Quels que soient ses drames, elle s’efforce de porter haut le flambeau des mots. K. E.

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