Les fiancées de La Baleine. Dans le ventre de La Baleine, Geneviève rêve d'une maison dont la porte s'ouvrirait sur la mer. Derrière elle, des « souvenirs trop douloureux pour l'accompagner en Louisiane ». Devant elle, le Nouveau Monde, la promesse d'un époux et l'inconnu. Geneviève fait partie des quatre-vingt-dix volontaires choisies pour rejoindre la Louisiane et peupler ses colonies. Toutes ont un lien avec l'hôpital de la Salpêtrière, où elles ont été élevées, comme Charlotte, placées, comme Pétronille, ou enfermées, comme Geneviève. Le récit suit la trajectoire de ces trois femmes des berges de la Seine aux rives du Mississippi, et entrelace leur destin à celui de leurs sœurs d'infortune et des hommes qui les attendent de l'autre côté de l'Atlantique. Si ses premières lignes décrivent leur arrivée sur la terre promise, le roman laisse au lecteur le temps de faire connaissance avec ses héroïnes, de découvrir leur passé pour comprendre qui elles sont quand, en 1720, elles embarquent à bord de La Baleine. Ayant survécu à l'enfer des tanneries qui pullulaient jadis sur la Bièvre, Geneviève n'a connu de douceur que dans les bras d'Amélie. Emprisonnée pour ses activités d'avorteuse, elle espère un nouveau départ en Amérique. Rejetée par sa famille, jugée indigne de son sang aristocratique, Pétronille a été emmenée à la Salpêtrière contre son gré. Pendant la traversée, elle s'éprend de Baptiste, un marin, qu'elle rêve d'épouser mais qui ne lui est pas promis. Orpheline de naissance, Charlotte quitte la Salpêtrière pour la première fois. Dans la mer des Caraïbes, elle s'illustre par sa bravoure quand La Baleine est assaillie par des pirates.
C'est dans leur courage et dans les liens d'amitié qu'elles tissent entre elles que les fiancées de La Baleine puisent la force d'affronter la peur et les éléments, la vermine et la maladie, et de s'avancer vers l'autel pour épouser un homme dont elles ignorent tout. À Biloxi, dans la touffeur de marais infestés de moustiques, la situation des colons semble désespérée, la lutte pour la survie est une nécessité quotidienne. « Sans eux, la Louisiane s'effondrera. Sans les femmes, elle s'éteindra avec cette génération. » Aux naissances succèdent les deuils, à l'adversité des victoires dérisoires, mais en ces terres nouvelles et sauvages sommeillent également des joies insoupçonnées. « À Biloxi, la maison de Geneviève est construite en bois de cyprès, et ses interstices comblés de mousse espagnole. [...] Elle ne voit pas l'océan depuis sa fenêtre mais une cour remplie d'herbes folles. » Inspiré de faits historiques méconnus, La Louisiane est né de rencontres de part et d'autre de l'Atlantique, d'un échange avec l'un des descendants des fiancées de La Baleine que Julia Malye croise en 2016. Au fil de recherches de plusieurs années, son trio d'héroïnes prend forme et leur destinée s'incarne dans une écriture d'une rare puissance figurative, infusée du temps nécessaire à son épanouissement. Chacune des 560 pages de La Louisiane, une des plus belles promesses de la rentrée d'hiver, est une réussite. On ne lit pas ce roman mais on le vit, et on s'en laisse pénétrer comme des embruns au cours d'une longue, d'une tumultueuse, d'une inoubliable traversée.
La Louisiane
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Tirage: 20 000 ex.
Prix: 23 € ; 560 p.
ISBN: 9782234094116