Festival du livre de Paris 2025

Hors Concours fête ses dix ans : un tremplin discret, mais efficace pour l’édition indépendante

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Hors Concours fête ses dix ans : un tremplin discret, mais efficace pour l’édition indépendante

La 10e sélection du prix Hors Concours est attendue ce vendredi lors du Festival du livre de Paris, ainsi qu'une annonce de développement à l'international. Retour sur le succès discret mais efficace de ce prix littéraire engagé et engageant.

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Par Éric Dupuy
Créé le 10.04.2025 à 11h49

Dix ans après sa création, le prix Hors Concours s’impose comme un acteur structurant de l’écosystème littéraire francophone. Porté par la structure Fontaine O Livres, ce prix défend depuis 2015 une ambition claire : offrir visibilité et reconnaissance aux auteurs et éditeurs issus de l’édition indépendante, encore trop souvent marginalisée.

« L’idée de départ était de désenclaver l’édition indépendante, de la rendre visible dans le paysage professionnel, auprès des libraires, bibliothécaires, journalistes », explique à Livres Hebdo Gaëlle Bohé, directrice de la structure qui accompagne l’édition (indépendante ou non), avec des formations et accompagnement en visibilité. Mission accomplie, au vu du chemin parcouru.

Une sélection exigeante et un dispositif structuré

Chaque année, ce sont près de 500 professionnels du livre – libraires, bibliothécaires, médiateurs – qui participent au processus de sélection. Les éditeurs indépendants envoient leurs ouvrages (romans, récits, fictions), publiés dans les 18 derniers mois. Une première sélection de 40 titres est opérée par l’« Académie Hors Concours », puis diffusée sous forme d’un catalogue.

Les lecteurs professionnels élisent ensuite cinq finalistes, lus en intégralité par un jury tournant, composé de libraires, éditeurs, bibliothécaires ou encore journalistes. À l’automne, sont annoncés le lauréat, une mention spéciale du jury et le coup de cœur des lecteurs, issus de clubs de lecture partenaires.

Un dispositif qui « joue pleinement son rôle de repérage », selon Gaëlle Bohé. « Quand on a le prix Hors Concours, on est écrivain. C’est une reconnaissance professionnelle qui permet de vendre des droits, d’obtenir des retirages ou d’accéder à des poches », affirme-t-elle.

Un rôle de défricheur confirmé

Le palmarès témoigne de la justesse du regard porté par le prix. Émilienne Malfatto, lauréate Hors Concours, a ensuite obtenu le Goncourt du premier roman. Sabyl Ghoussoub, sélectionné lorsqu’il était publié chez L’Antilope, a remporté en 2022 le Goncourt des lycéens avec Stock. Des trajectoires révélatrices : « On repère des auteurs à l’état brut, souvent au moment de leur premier roman », observe l’ancienne journaliste.

Outre le rayonnement des lauréats, le prix contribue aussi à structurer un secteur hétérogène, à travers la constitution d’une bibliothèque annuelle de l’édition indépendante, considérée par Gaëlle Bohé comme sa « petite Pléiade ». Une manière de fixer une mémoire collective, souvent difficile à reconstituer du fait de la dispersion des acteurs.

Une édition indépendante en mutation

Le bilan du prix, dont la prochaine sélection sera annoncée lors du Festival du livre de Paris le 11 avril, est aussi l’occasion d’un constat plus large sur la transformation du secteur indépendant. « Il y a dix ans, l’édition indépendante était encore très artisanale. Aujourd’hui, elle rivalise en qualité avec l’édition traditionnelle, parfois même la dépasse », souligne Gaëlle Bohé.

Graphisme, choix des papiers, travail éditorial : les maisons indépendantes ont gagné en professionnalisme, portées par l’émergence de formations spécialisées, une meilleure accessibilité aux outils de production et un renouvellement générationnel. « On n’est plus dans une édition engagée mais bricolée. On voit apparaître une nouvelle génération, exigeante, formée, esthétiquement assurée », remarque-t-elle.

Un prix sans dotation, mais à forte valeur ajoutée

Sans récompense financière, le Prix Hors Concours mise sur la visibilité et l’intégration dans l’interprofession comme leviers. Les effets sont réels, mais relatifs : « On ne peut pas parler d’augmentation des ventes par trois ou quatre, parce qu’on part de très bas. Mais on note systématiquement des retirages, des cessions de droits, des articles dans la presse, parfois à l’international. »

C’est aussi un tremplin pour les auteurs, souvent approchés après la sélection : « Parfois, c’est un peu douloureux de voir partir un auteur qu’on a accompagné, mais c’est aussi le jeu, et les auteurs savent reconnaître le travail de leur premier éditeur. »

Pour ce 10e anniversaire, l’équipe prépare une série de temps forts, dont une première annonce lors du rendez-vous de l’édition à Paris (lire ci-après). « Il reste encore beaucoup à faire, mais on a franchi un vrai cap », conclut Gaëlle Bohé. Dix ans après, le prix Hors Concours confirme son rôle d’accélérateur de trajectoires littéraires et de vecteur de structuration du secteur indépendant.

Un catalogue en anglais pour valoriser la sélection à l’international

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