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Foire de Francfort : au travail !

OLIVIER DION

Foire de Francfort : au travail !

Désormais rassurés sur leur capacité à développer une activité numérique à côté de l'imprimé, les éditeurs ont retrouvé, du 12 au 16 octobre à la Foire du livre de Francfort, le plaisir des échanges sur les projets et les contenus, quels que soient leurs supports. Avec deux fois plus de conférences que l'an dernier, la grande manifestation internationale s'impose maintenant comme un lieu de rencontre et de découverte complémentai

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Par Anne-Laure Walter, Fabrice Piault, Hervé Hugueny, Claude Combet, Catherine Andreucci
Créé le 27.05.2015 à 18h32 ,
Mis à jour le 29.05.2015 à 15h02

A voir l'ambiance qui prévalait à la 63e Foire internationale du livre de Francfort, du 12 au 16 octobre, il était difficile de croire que le monde traverse une crise économique majeure. La chape de plomb que le choc financier de 2008 et les bouleversements numériques font peser depuis plusieurs années sur les échanges de droits s'est envolée. A l'attentisme et à la morosité succède un regain d'optimisme, nourri du constat étayé par les expériences américaine et britannique que l'édition peut bénéficier d'un relais de croissance dans le numérique. "On sent une réouverture des échanges, les éditeurs sont moins sinistrés dans leur tête", observe Jean-Guy Boin, le directeur général du Bureau international de l'édition française (Bief), dont le stand collectif rassemblait 150 éditeurs français.

GRASSET TOMBE LA VESTE. Olivier Nora et Manuel Carcassonne sont ravis de l'intérêt que suscite L'élimination, la biographie de Rithy Panh, cinéaste, rescapé des camps khmers rouges. - Photo OLIVIER DION

Symbole de ce nouveau climat : le doublement cette année du nombre de conférences - et de leur audience - au grand rendez-vous professionnel mondial. "Les éditeurs n'ont pas seulement besoin de nouvelles idées de livres, mais aussi de nouvelles idées de modèles économiques", affirme le directeur de la foire, Jürgen Boos, pour qui Francfort reprend non seulement tout son sens, mais voit aussi sa fonction amplifiée. Mettant l'accent sur la "formation continue", il a lancé cette année la Frankfurt Academy. Ce programme de séminaires payants va des colloques, comme StoryDrive (cessions de droits cinéma, audiovisuels et jeux ; 800 euros les deux jours), aux formations express pour nouveaux visiteurs ou sur le marché des tablettes (environ 50 euros les deux heures). "Le programme devrait encore grossir l'an prochain", annonce-t-il.

RÉUNION DE P-DG. La plupart des grands éditeurs se déplacent à l'occasion de la Foire où ils sont restés, cette fois, plus longtemps que d'habitude. De g. à d. : F. Esménard, T. Cremisi, A. Gallimard, A. Kouck, H. de La Martinière.- Photo OLIVIER DION

PARLER DU NUMÉRIQUE, ÇA RAPPORTE

Cela n'empêche pas le traditionnel séminaire international des responsables des droits de faire salle comble, le mardi, avec plus de 250 participants concentrés cette fois sur l'émergence du Brésil sur la scène éditoriale mondiale, et sur les conditions juridiques de la création des "apps". Car c'est bien le numérique qui nourrit le besoin de formation. Au vu du nombre de conférences payantes organisées, parler du livre numérique reste d'ailleurs peut-être plus rentable que d'en vendre ! L'éditeur américain O'Reilly a ouvert la voie il y a deux ans en important Tools of Change for Publishing (TOC), qui a encore réuni cette année 500 auditeurs la veille de l'ouverture de la foire (450 euros la journée). A côté de ce rendez-vous bien rodé, il tentait aussi un programme thématique sur les réseaux sociaux. De son côté, Publishers Marketplace organisait pour la première fois le lundi une conférence sur la mondialisation du marché du livre numérique (plus de 700 euros), et le mardi une autre sur le livre jeunesse.

GLÉNAT CHEZ LES AMÉRICAINS. L'installation de Glénat dans le hall anglo-saxon, permet, selon Jean Pacciuli, DG, de développer les échanges pour les licences comme Elle, "et de voir des éditeurs moins connus, comme les Sud-Américains". - Photo OLIVIER DION

OUTILS FRANÇAIS

Parmi les trois géants des nouvelles technologies qui secouent le monde du livre, seul Apple n'a participé à aucun de ces programmes. Dans le hall anglo-saxon Google expliquait aux éditeurs tout le bénéfice qu'ils pouvaient tirer de Google eBooks, et Amazon proposait aux auteurs ses services d'auto-édition. Fait rare, deux entreprises françaises proposaient des conférences professionnelles : le groupe Jouve, imprimeur mais surtout concepteur de fichiers adaptés aux multiples supports de lecture, et, plus inattendu, Belin, qui présentait son logiciel de création de manuels numériques, Lib'. "Notre outil est de très bonne qualité mais il faut d'abord créer un marché. Nous pouvons y contribuer en diffusant notre technologie à l'international comme parmi nos confrères français", estime la P-DG, Sylvie Marcé.

AVEZ-VOUS VU HAROLD FRY ?. Ce badge est un coup de communication de l'agence britannique Conville & Walsh qui vendait les droits d'un roman de Rachel Joyce, décrit comme "le nouveau Forrest Gump", que Oh ! éditions a acheté pour la France.- Photo OLIVIER DION

Francfort redevient ainsi une chambre d'écho des mutations du marché. Les annonces de lancement de liseuses par les réseaux de librairies se sont multipliées. Les chaînes allemandes Weltbild et Hugendubel ont lancé la leur la semaine précédente ; l'American Booksellers Association a déclaré y travailler ; le britannique Waterstone's a annoncé la sienne pour 2012 ; et WH Smith a signé, comme la Fnac en France, avec le canadien Kobo. Des représentants de la chaîne française étaient d'ailleurs présents pour expliquer à la presse le sens de leur accord.

ÉLECTRE OFFRE SES SERVICES. Electre et Livres Hebdo étaient sur le stand collectif français du Bief. Un espace de 580 m2 avec 150 éditeurs où le CNL avait pour la première fois un bureau. - Photo OLIVIER DION

Si la physionomie de la foire a changé - on découvre désormais des stands où les apps ont totalement remplacé les livres -, le numérique a été digéré. "Les éditeurs ne sont plus dans le déni, ils s'approprient le numérique beaucoup plus", se réjouit le P-DG de Média-Participations, Vincent Montagne, qui sent "un dynamisme nouveau" à la foire. Passé l'affolement et les tâtonnements, les éditeurs sont rassurés sur leur rôle de pourvoyeur de contenus. Les échanges reprennent sens. "C'est une foire post-traumatique, où l'on parle à nouveau de livres et d'auteurs, où l'on se centre vraiment sur les contenus et les projets", se félicite Philippe Robinet (Oh ! éditions). "Alors que l'an passé tout le monde était hyper prudent, les éditeurs repartent à la recherche de projets porteurs", remarque Stéphane Marsan (Bragelonne), qui a vendu une nouvelle trilogie de fantasy en Allemagne et en Espagne. Lionel Hoëbeke s'enthousiasme pour "des livres d'une belle modernité, bien réfléchis en tant qu'objets, en particulier sur les stands allemands. Sous la pression d'Internet, les éditeurs se sont mis à réfléchir à la spécificité du livre imprimé".

LES DROITS BIEN RANGÉS. L'espace des agents a été installé cette année, au rez-de-chaussée du hall 6, juste sous les stands français. La fréquentation de cet espace a augmenté de 11 %. - Photo OLIVIER DION

NORMAUX

Les éditeurs ne surinvestissent plus en temps sur le numérique. "Les rendez-vous numériques avec Apple, Amazon ou autres sont devenus des rendez-vous normaux, tandis que, dans les négociations de droits, le numérique est devenu un thème parmi d'autres », remarque Louis Delas, le P-DG de Casterman et de Fluide glacial. D'autant que "la donne a un peu changé avec l'arrivée du Kindle en France", note Béatrice Duval, qui quittera les Presses de la Cité pour la direction générale de Denoël le 3 novembre. Des initiatives telle Izneo, la plateforme numérique des éditeurs de BD, assoient la légitimité numérique des Français auprès des étrangers. Les regards évoluent. "Les agents sont conscients que le marché est en train de se créer en France et en Europe, estime Olivier Bétourné, P-DG du Seuil, qui vient d'acquérir les droits numériques du fonds David Grossman pour trois ans. Nous signons désormais systématiquement, à 90 %, les droits numériques, ce qui n'était pas vrai il y a six mois."

APPLE EN LIVRE PAPIER. Steve Jobs sur le stand d'Hachette UK à l'occasion de la parution de sa biographie autorisée par Walter Isaacson (à paraître en France le 2 novembre chez Lattès).- Photo OLIVIER DION

Pour lui, toutefois, "c'est une foire un peu déconcertante, à la fois très vivante et pas très spectaculaire". En ces temps de crise, il est même mal vu de faire de gros chèques. La rumeur selon laquelle Planeta aurait déboursé 1 million d'euros pour la backlist (les livres plus anciens) de Paul Auster, alors que le livre subit une crise sans précédent en Espagne, fait jaser dans les allées. Les gros deals, comme ceux d'Albin Michel pour l'enquête de Hal Vaughan sur les liens de Coco Chanel avec le régime nazi, ou de Flammarion pour la biographie d'Amy Winehouse par son père, ont été signés avant la foire. Beaucoup d'éditeurs ont fait la tournée des agents new-yorkais quinze jours avant Francfort. "La fonction de la foire évolue, explique Pascal Assathiany, P-DG du Boréal. Elle permet de multiplier, grâce aux réseaux, les "mini-découvertes", sur des titres de deuxième ligne." Albin Michel a obtenu la trilogie suédoise que tout le monde s'arrachait, L'ami andalou, >d'Alexander Sanderberg, vendue par l'agent suédois de Jo Nesbø et de Sofi Oksanen. Stock a acheté Life between the ocean de Margot Steadman. Flammarion a acquis chez Canongate un reportage gonzo sur les Stones. Les grandes agences anglo-saxonnes ont fait circuler de multiples fictions ou témoignages sur les soldats en Irak, Afghanistan ou Israël. Les responsables de droits n'ont eu, à l'instar de Delphine Ribouchon à La Découverte, "aucun mal à remplir le planning de rendez-vous", et la fréquentation du centre des agents a cru de 11 %.

DEUX SIKHS. 106 pays sont représentés lors de la Foire de Francfort. L'hémisphère sud est attendu en force l'an prochain, du 10 au 14 octobre 2012, avec l'invitation de la Nouvelle-Zélande.- Photo OLIVIER DION

"ON BUZZE AVANT, ON SIGNE APRÈS."

C'est le retour aux fondamentaux de l'édition : "J'ai beaucoup de lecture. Ça progresse doucement. Le vrai boulot, quoi !" lance Patrice Hoffmann (Flammarion). "Francfort représente le summum de mon année, rappelle la directrice des droits de Gallimard, Anne-Solange Noble. Je rencontre de visu les gens avec qui je suis en contact toute l'année." "On buzze avant, on signe après", résume Claude Tarrène (Le Dilettante). Les échanges reprennent, même si "le nombre de traductions en Europe du Sud et de l'Est a énormément baissé", déplore Anne Madelain (éditions de l'EHESS). La foire répercute les difficultés de la Grèce, de l'Espagne ou du Portugal, mais aussi du Japon : il était stupéfiant de voir les géants Shogakukan ou Kodansha sur un micro-stand.

La France reste toujours très attractive pour les étrangers, comme en témoigne le succès du cocktail d'Albin Michel autour de Katherine Pancol, avec ses 37 éditeurs dans le monde. La BD franco-belge bénéficie de l'adaptation de Tintin par Spielberg. Casterman signale une grosse activité autour des 6 albums dérivés du film. La série de 24 albums dérivés du Petit Prince, "vendue à la moitié du monde avant la foire, l'aura été à l'autre moitié pendant", indique Jean Paciulli (Glénat). "Des Américains viennent même nous voir pour qu'on construise avec eux la BD aux Etats-Unis", affirme François Pernot, le DG du pôle image de Média-Participations.

"En littérature pure, les étrangers recherchent surtout l'histoire, la narration originale, l'intrigue qui se distingue", note Claude Tarrène, citant l'intérêt pour >le premier roman d'Alain Guyard, La zonzon. Lattès a signé 16 cessions pour le roman de Delphine de Vigan. Le Cherche Midi a vu 40 éditeurs poser une option sur le livre de Charlotte Valandrey, De coeur inconnu. Le >Seuil a des contrats engagés sur plusieurs titres de la rentrée (Lydie Salvayre, Xabi Molia, Patrick Deville...). Gallimard enregistre un fort intérêt pour les nouveaux romans de David Foenkinos (dont La délicatesse est traduit dans 20 pays), Boualem Sansal et Carole Martinez. L'envie de Sophie Fontanel (Robert Laffont) est parti dans quelque dix pays. L'équation africaine de Yasmina Khadra (Julliard) séduit, comme Monsieur le commandant, de Romain Slocombe (Nil).

TVA À TOUT-VA

Avec une commissaire européenne à leur disposition pendant une matinée, les exposants ont pu faire passer leurs messages. "Notre industrie se transforme très rapidement, nous ne sommes pas démodés. Mais nous avons besoin d'un environnement légal pour notre activité. Nous tenons aux équilibres : on n'a rien inventé de mieux que les libraires pour présenter les livres. J'aimerais avoir une heure avec vous en face à face pour vous en convaincre. Nous ne sommes pas seulement dans le business, nous sommes dans la culture", a déclaré Arnaud Nourry, P-DG d'Hachette Livre, à Neelie Kroes, qui feuilletait sur le stand du groupe des livres numériques enrichis. Acquise à la nécessité de ramener la TVA des ebooks au niveau de celle des livres papier, la commissaire chargée de la stratégie numérique a rappelé que ce dossier n'est pas de son ressort. Et elle a ajouté qu'il se heurte "à un niveau de conservatisme vraiment décevant". Presque tous les ministres européens des finances y sont opposés, et l'Allemagne est en pointe dans la remise au pas des "cultureux". Egalement présent à Francfort, Jacques Toubon, chargé de convaincre les instances européennes de la légitimité de cette réduction de TVA, a fort à faire jusqu'au 1er janvier, échéance que la France s'est fixée pour sa TVA à 5,5 % sur le numérique.

LA JEUNESSE ENTRE "APPS" ET EBOOKS ENRICHIS

LE TEST DES EBOOKS CHEZ DORLING KINDERSLEY- Photo OLIVIER DION

Pour la première fois à Francfort, un colloque "Children Publishing Goes Digital" a été spécifiquement consacré, le 11 octobre, au numérique dans l'édition pour la jeunesse. Et de fait, cette activité s'est imposée cette année comme un véritable business >dans lequel les Français ne sont pas en reste. Sur les stands hexagonaux, la séduction des "apps" et des divers ebooks enrichis était contagieuse. Si Nathan, pionnier des applications pour la jeunesse sur iPad, annonçait avoir vendu 40 000 T'choupi joue avec les couleurs depuis décembre 2010, d'autres éditeurs témoignaient de leur créativité dans ce domaine, comme Bayard, Usborne ou Gallimard Jeunesse. Hachette Jeunesse ou Albin Michel Jeunesse leur préfèrent l'ebook enrichi.

UNE BALLE DANS LE PIED

La directrice d'Albin Michel Jeunesse, Marion Jablonski, présentait L'herbier des fées de Benjamin Lacombe, dont le travail sophistiqué trouve un écho en numérique, avec fondus enchaînés, petits films tremblés à la Méliès et dissections de fées. Pour Montreuil seront aussi disponibles 60 titres de la série Geronimo Stilton, et plusieurs albums de Jacques Duquesnoy. "L'Apple Store est suicidaire, assure-t-elle, c'est un environnement gratuit, et les applications ne sont qu'un outil promotionnel. On ne peut pas vendre une oeuvre dans ce contexte.""On se tire une balle dans le pied quand on vend 0,79 euro une application avec de l'animation, du son, ou une version bilingue. Mais à plus de 2 euros, les gens ont l'impression qu'on les assassine", remarque Franck Girard, directeur général de Bayard éditions-Milan.

Tandis que Nathan continue d'explorer la réalité augmentée, Milan a développé un Atlas unique : on promène l'iPhone (ou l'iPod Touch) sur la page et apparaît un menu proposant informations, photos, vidéos, jeux. L'éditeur le décline à travers plusieurs applications. "On ne dévalorise pas l'objet papier puisqu'il peut être acheté seul. L'application n'est pas un substitut du livre mais un complément nécessaire", commente Franck Girard.

Compte tenu du coût de production, la coédition est primordiale. Gallimard Jeunesse va signer cinq contrats avec les coéditeurs de la collection papier, mais publiera directement en russe, faute d'interlocuteur dans ce pays. "Même avec une application multilingue, les éditeurs ont du mal à s'implanter sur des marchés locaux qu'ils ne connaissent pas. Le monopole de l'App Store les pousse aussi à chercher des canaux de distribution complémentaires", confirme Terence Mosca, responsable du numérique pour Gallimard Jeunesse.

Des leaders de l'édition mondiale plutôt optimistes

Arnaud Nourry, Hachette Livre- Photo OLIVIER DION

Les ventes de livres papier se contractent mais la lecture n'est pas sur le déclin", a affirmé le patron de Penguin, John Makinson. En compagnie de trois autres poids lourds du marché du livre, Arnaud Nourry (Hachette), Yu Chunchi (China Education) et Oleg Novikov (Eksmo), il a échangé sur l'avenir du métier lors d'un débat à Francfort organisé autour du "Classement Livres Hebdo de l'édition mondiale" par Livres Hebdo avec Publishers Weekly, Buchreport, PublishNews Brazil et The Bookseller.

Oleg Novikov, Eksmo- Photo OLIVIER DION

Le défi des grands groupes est, selon Yu Chunchi, "de donner aux lecteurs accès aux contenus en étant flexibles en s'adaptant à la demande". L'optimisme était de rigueur à l'exception d'Oleg Novikov qui s'inquiète du marché russe "en recul depuis deux ans. Nous sommes passés de 60 % de lecteurs à 40 % en quelques années en raison des difficultés sociales, du piratage et du manque de librairies : la plus grosse chaîne avec 100 magasins vient de faire faillite". Arnaud Nourry s'est alors lancé dans un vibrant hommage aux librairies, "clés de la diversité éditoriale, soutien de nos auteurs".

John Makinson, Penguin- Photo OLIVIER DION

John Makinson, dont l'analyse a rejoint celle du P-DG d'Hachette Livre durant tout le débat, a proposé quatre axes pour l'aider. "Il faut que la librairie soit le "ciment de la communauté", car se rendre dans une librairie physique, à l'heure d'Amazon est économiquement irrationnel. Il s'agit de rendre cela nécessaire." Les éditeurs doivent, eux, "faire les livres les plus beaux possible pour que l'expérience d'aller en librairie soit un ravissement". Plus surprenant, il incite les libraires à "faire pression sur les pouvoirs publics, notamment sur les taxes". Il veut aussi transformer "la relation entre éditeur et librairie en une meilleure collaboration pour éviter des retours massifs".

LE NUMÉRIQUE À 40 % ?

Yu Chunchi, China Education- Photo OLIVIER DION

Les "nouveaux horizons de l'édition", thème de la rencontre, incluaient bien sûr les développements numériques. Arnaud Nourry a expliqué que la part de ce dernier dans l'activité des éditeurs finira par atteindre un palier. Quel sera-t-il ? Les intervenants ont avancé un possible... 40 %. Ils ont rappelé que le métier de l'éditeur restait le même : "Trouver le bon projet, travailler avec un auteur et faire des livres imprimés encore plus beaux", selon les termes d'Arnaud Nourry.

Dans la salle- Photo OLIVIER DION

Les autres pistes de développements résident dans les marchés émergents, les "Brics" (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud), qui, contrairement aux marchés français, britannique ou américain, "sont en croissance et ne sont pas concentrés", >comme l'analyse Arnaud Nourry, qui rappelle cependant que "ce ne sont pas des marchés faciles". Hachette a dû arrêter récemment son activité au Brésil. Arnaud Nourry et John Makinson ont expliqué leur stratégie d'implantation de filiales, de joint-ventures ou de prises de participation dans ces divers pays. Vu de la Chine, le marché occidental est aussi attrayant, et Yu Chunchi est persuadé que les collaborations vont se nouer pour promouvoir la langue et la culture chinoises dans les prochaines années.

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