Traditionnellement plus légère mais relativement stable (152 titres contre 157 en 2019), la rentrée de l'hiver du domaine étranger se caractérise par son goût pour la découverte. En dehors de deux inédits importants signés Yukio Mishima (Gallimard) et Isaac Bashevis Singer (Stock) et des derniers Ian McEwan (Gallimard) et T. C. Boyle (Grasset), les parutions de janvier-février font la part belle aux premiers romans, au nombre de 20 (sur un total de 152 nouveautés). Parmi ceux-ci, Au rythme de notre colère, de Guy Gunaratne, d'origine sri-lankaise (Grasset), qui arrive auréolé de la réputation d'un des titres les plus marquants de l'année selon la presse britannique et raconte les affrontements entre skinheads et jeunes musulmans dans une cité du nord de Londres. Elmet, de la Britannique Fiona Mozley (Losfeld), finaliste du Man Booker Prize 2017, met en scène une famille digne des Brontë tandis que La fille de l'Espagnole, de la Vénézuélienne Karina Sainz Borgo (Gallimard), sélectionné par le New York Times, un commando féministe. Citons également : Les toits du paradis, de Mathanghi Subramanian (L'Aube) ; Dans la prison en flammes, de Ryan Chapman (Autrement) ; Les Ribkins, héros de père en fils, de Ladee Hubbard (Belfond) ; Un jour, je serai trop célèbre, de Raziel Reid (La belle colère) ; La vie dont nous rêvions, de Kerry Lonsdale (City) ; La résurrection de Joan Ashby, de Cherise Wolas (Delcourt) ; A l'ombre des loups, d'Alvydass Slepikas (Flammarion) ; Fais de ta vie un rêve, et de ton rêve une réalité, de Natascha Lusenti (Fleuve éditions) ; Eau douce, d'Akwaeke Emezi (Gallimard) ; Tous les vivants, de C. E. Morgan (Gallimard) ; Sugar run, de Mesha Maren (Gallmeister) ; Tout commence par la baleine, de Cristina Sandu (Laffont) ; A moi la nuit, toi le jour, de Beth O'Leary (Mazarine) ; Le silence d'Isra, d'Etaf Rum (L'Observatoire) ; Tant qu'il y aura des cèdres, de Pierre Jarawan (Héloïse d'Ormesson) ; La dernière mission d'Akram, de Nadim Safdar (Piranha) ; Dans son sillage, de Jessica Andrews (Plon) ; De rien ni personne, de Dario Levantino (Rivages) ; Là où chantent les écrevisses, de Delai Owens (Seuil).

Curiosités

La rentrée d'hiver reste un enjeu pour les éditeurs qui comptent bien imposer leurs titres parfois achetés cher à l'étranger. Les Escales mise sur Les optimistes, de Rebecca Makkai, qui retrace les années Sida dans le Chicago des années 1980, et figure parmi les cinq meilleurs romans de l'année pour le New York Times, finaliste du Pulitzer 2019 et du National Book Award, lauréat de la Andrew Carnegie Medal for fiction. Fayard a choisi le Britannique Edward Docx, avec Trois jours d'amour et de colère, le dernier voyage d'un père et de ses trois fils, et Matias Faldbakken, grand plasticien et écrivain norvégien traduit pour la première fois en français, avec Le serveur, un huis-clos dans un restaurant. Anakana Schofield (Martin John, Actes Sud), Alyson Hagy (Les sœurs de Blackwater, Zulma) sont aussi traduites pour la première fois en français.

La rentrée apporte aussi son lot de curiosités comme Le roman de la vie de Tyll l'Espiègle, de Daniel Kehlmann, une vaste fresque sur la guerre de Trente ans, vendue à 500 000 exemplaires en Allemagne (Actes Sud), Parmi les ombres, de Joseph O'Connor, la biographie fictive de Bram Stoker (Rivages) et Allegheny River, de Matthew Neill Null, un recueil de nouvelles qui traitent de la nature ravagée par l'homme (Albin Michel).

Les lecteurs retrouveront quand même des signatures connues comme Lionel Shriver, l'auteure d'Il faut qu'on parle de Kevin, avec un recueil de nouvelles, Propriétés privées (Belfond) ; le Nigérian Chogozie Obioma (passé de L'Olivier à Buchet Chastel) avec La prière des oiseaux ; Jaume Cabré avec un recueil de nouvelles, Quand arrive la pénombre ; Kerry Hudson, prix Femina étranger 2015 pour La couleur de l'eau, avec Basse naissance (P. Rey) ; Garry Shteyngart avec Lake success (L'Olivier) ; Torgny Lindgren, avec Klingsor, la biographie fictive d'un peintre médiocre, et l'Israëlien Yishaï Sarid, avec Le monstre de la mémoire, qui met en scène un historien devenu guide des camps de la mort (tous trois chez Actes Sud). Ils liront Liane Moriarty, l'auteure du Secret du mari avec Neuf parfaits étrangers (Albin Michel), Elizabeth Gilbert, l'auteure de Mange, prie, aime, avec Au bonheur des filles et Téa Obreht, l'auteure de La femme du tigre, avec Inland, un western situé en Arizona en 1893 (toutes deux chez Calmann-Levy), la Danoise Helle Helle avec Perdus en forêt (Phébus), l'Allemand Robert Seethaler (Le champ, Wespieser), les Américains Nickolas Butler (passé d'Autrement à Stock) avec Le petit-fils, et Leah Hager Cohen, Des gens comme nous (passée de Bourgois à Actes Sud), une histoire de famille entre « Jeffrey Eugenides et Ann Patchett » ainsi que Augusto Roa Bastos avec Moi, le suprême (Ypsilon) et Tandis que Les sables de l'empereur, de Mia Couto est l'édition en un volume d'une trilogie parue au Portugal revue par l'auteure, et que La septième croix, d'Anna Seghers, est la nouvelle traduction inédite d'un chef-d'œuvre de la littérature allemande sur la montée du nazisme, indisponible depuis dix ans (tous deux chez Métailié).

Guerres

Le nazisme, les camps d'extermination et la Seconde Guerre mondiale restent un sujet de fond souvent traité en dehors de l'Hexagone. Outre Anna Seghers, les écrivains Hanni Münzer (L'Archipel), Hans Fallada (Denoël), Martin Danes, qui s'inspire de la vie de l'écrivain tchèque K. Polacek (La Différence), Louisa Hall (Gallimard) qui brosse le portrait du créateur de la bombe atomique, Ottavia Casagrande (Liana Levi), dont le héros, espion, a pour mission de semer la zizanie entre Hitler et Mussolini, et Jiri Weil (Le Nouvel Attila), ont choisi cette période. 

Alors que l'Autre regard réédite Dans le scriptorium, de Paul Auster, illustré par Astrid Belvezet, on retrouvera l'auteur de 4 3 2 1 dans Une vie dans les mots, un livre d'entretiens avec Inge Birgitte Siegumfeldt. C'est du côté de la non-fiction et des essais littéraires que l'on retrouve les poids lourds. On lira les -t-émoignages du grec -Iakovos -Kampanélis sur Mauthausen (Albin Michel), de la journaliste italienne Oriana Fallaci sur le Vietnam et le Mexique (Belles lettres), Pardon, une lettre à son père décédé qui l'a violée et battue, d'Eve Ensler, l'auteure des Mono-logues du vagin (Denoël), la première traduction intégrale des journaux de Kafka (1910-1922) (Nous). Eclat programme des essais de l'auteure de science--fiction Ursula K. Le Guinn, Flammarion des écrits de Doris Lessing, prix Nobel 2007, et Allia les réflexions de Novalis. Sans oublier de nombreuses correspondances : cinq lettres adressées par une jeune étudiante américaine, Blossom Margaret -Douthat à Simone de Beauvoir (éditions du Mauconduit), la Correspondance Johann Wolfgang von Goethe et Bettina von Arnim (Le Passeur) et celle d'Ernst Jünger avec le juriste Carl Schmitt (Pierre--Guillaume de Roux). -Enfin Stefan Zweig est aussi la vedette de cette rentrée avec des écrits politiques inédits (Pas de défaite pour l'esprit libre chez Albin Michel et L'Esprit européen en exil, 1933-1942 chez -Bartillat), et sa correspondance 1912-1940 aux éditions universitaires de Dijon. C. C. W

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