3 janvier > Roman France > Cécile Ladjali

Les identités multiples, les refus d’assignation et le salut par la littérature… tous les romans de Cécile Ladjali explorent plus ou moins directement ces questions. Jusqu’au frontal Shâb ou La nuit, roman autobiographique (Actes Sud, 2013) dans lequel l’agrégée de lettres, professeure à la Sorbonne Nouvelle, interrogeait sa propre individualité composite, elle qui, née d’une mère iranienne, a été élevée par un couple de Français.

L’Iran est aussi l’un des pays des origines pour Bénédict Laudes, charismatique professeur de littérature comparée à l’Université de Lausanne et brouilleur de frontières. Perse du côté de la mère, Suisse du côté du père, un pasteur originaire du canton de Vaud, cet enseignant au physique androgyne et à la voix de contralto, incapable de voir les couleurs depuis une crise d’épilepsie à 13 ans, dégage une aura mystérieuse. Construit en deux parties - "Blanc" en Suisse, "Noir" à Téhéran où le professeur Laudes est invité pour un séminaire d’un semestre - et ménageant à la fin du premier tiers du roman un retournement qu’on ne dévoilera pas, Bénédict creuse et élucide la fascination, l’attraction trouble qu’exerce le "Maître" sur ses élèves, en particulier sur deux étudiants en thèse pour qui les mots du professeur résonnent "comme une prière, comme un chant".

Il ne fait pas de doute que Cécile Ladjali partage l’élan à la fois mystique et incarné vers la poésie qui habite son personnage nourri d’une double tradition occidentale et orientale, des vers du poète soufi Farid al-Din Attar dans Le cantique des oiseaux comme des "pages incandescentes de Jean l’Evangéliste". Un roman hanté de cœurs ardents et d’âmes exaltées aux hautes aspirations spirituelles, de désir fervent d’élévation et de réconciliation. Véronique Rossignol

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