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Dossier Histoire : l'histoire coupée en deux

OLIVIER DION

Dossier Histoire : l'histoire coupée en deux

Alors que la demande pour la production historique s'essouffle, le secteur de l'histoire populaire fait preuve d'un bon dynamisme. Les éditeurs s'adaptent sans pour autant abandonner la recherche, qui reste ponctuellement capable de séduire un public plus large.

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Par Charles Knappek
Créé le 05.04.2014 à 03h31 ,
Mis à jour le 13.02.2015 à 16h16

Hormis en histoire populaire, les éditeurs d'ouvrages historiques ont, encore une fois, connu une année difficile. Les bons résultats enregistrés par Secrets d'histoire 3 de Stéphane Bern (Albin Michel) et Du sang sur l'histoire de Franck Ferrand (Flammarion) ne sauraient occulter les difficultés structurelles d'un marché qui peine à écouler les titres dits intermédiaires.

Si Lise Boëll, l'éditrice de Stéphane Bern chez Albin Michel, se félicite d'avoir su "imposer un style" et d'avoir vendu 235 000 exemplaires de la série depuis la parution du premier volume en 2010, dont 82 000 pour le tome 3, sa collègue des sciences humaines chez Albin Michel, Hélène Monsacré, rencontre sans surprise plus de difficultés. «Dès qu'un livre est un peu exigeant, les ventes sont faibles. Il n'y a pas d'entre-deux. On a, d'un côté, L'énéide [nouvellement traduit par Paul Veyne et vendu à 12 000 exemplaires en six semaines, NDLR] et, de l'autre, les livres de grande vulgarisation."

"Pour deux livres achetés dans la série des "Nuls", nous offrons le premier tome de l'histoire de France en BD." MARIE-ANNE JOST-KOTIK, FIRST- Photo OLIVIER DION

Le constat est partagé par le P-DG de Tallandier, Xavier de Bartillat, pour qui «les livres à succès concentrent les moyens de promotion et captent l'attention des lecteurs, mais aussi celle des libraires qui hésitent à consacrer du rayonnage à des titres moins porteurs". En ligne de mire, entre autres ouvrages, les multiples déclinaisons de la série "Pour les nuls", chez First, ou encore les livres illustrés de Larousse dans la collection "Les documents de l'histoire".

"Les livres à succès concentrent les moyens de promotion et captent l'attention des lecteurs, mais aussi celle des libraires qui hésitent à consacrer du rayonnage à des titres moins porteurs." XAVIER DE BARTILLAT, TALLANDIER- Photo OLIVIER DION

ENGOUEMENT POUR LA NOSTALGIE

A la librairie rouennaise L'Armitière, Alexandre Mary note aussi un engouement réel pour les beaux livres misant sur la nostalgie, comme Le grand album d'histoire de France de notre enfance (Gründ) ou Nos géographies de France de Daniel Picouly (Hoëbeke). Une tendance sur laquelle surfent également Les Arènes avec la collection de beaux livres "L'histoire dans nos mains". «Nous publions peu de livres d'histoire, cinq ou six par an, mais ce sont tous des succès", souligne le P-DG des Arènes, Laurent Beccaria, qui revendique 45 000 exemplaires vendus pour Les paysans, et 20 000 pour Les Alsaciens, tous deux parus en octobre.

"Ces titres répondent à une demande de contenus de fond dans un contexte de lecture-plaisir. C'est l'histoire par le bout de la lorgnette." CHRISTINE DAUPHANT, LAROUSSE- Photo OLIVIER DION

Chez First, l'année a été marquée par la parution des volumes 2 et 3 de L'histoire de France pour les nuls en bande dessinée, qui comptera au total 12 volumes. En mars, l'éditeur monte l'opération "La fête des nuls" : "Pour deux livres achetés dans la série des "Nuls", nous offrons le premier tome de l'histoire de France en BD", explique Marie-Anne Jost-Kotik, directrice éditoriale du pôle référence. Inspiré par l'exemple des "Nuls", Larousse a publié en juin L'histoire de France pour ceux qui ont tout oublié et, en novembre, Le grand bêtisier de l'histoire de France. D'abord tiré à 10 000 unités, ce dernier a déjà fait l'objet de quatre réimpressions, affirme Christine Dauphant, la directrice éditoriale. «Ces titres répondent à une demande de contenus de fond dans un contexte de lecture-plaisir. C'est l'histoire par le bout de la lorgnette", décrypte-t-elle. Dans la même veine, La tortue d'Eschyle et autres morts stupides de l'histoire, aux Arènes, a déjà séduit 25 000 lecteurs depuis sa sortie en octobre.

"La volonté de conserver une tradition bien établie de belles éditions définitives sur un sujet donné." JEAN-CHRISTOPHE TAMISIER, ARMAND COLIN- Photo OLIVIER DION

L'histoire populaire peut aussi être plus sérieuse : Privat tire son épingle du jeu en publiant des ouvrages ancrés géographiquement dans l'espace avec des histoires de villes comme Histoire de Cannes, le dernier en date, paru en janvier 2012, ou de territoires : Tonnerre sur Cambrai, beau livre écoulé à 2 500 exemplaires, retrace l'histoire de la base aérienne René-Mouchotte, fermée en 2012. «Le livre a été très bien porté par les librairies du Nord et nous avons dû le réimprimer pour répondre à la demande", souligne Philippe Terrancle, directeur délégué de Privat. L'aviation représente l'un des axes forts de la maison toulousaine avec, parus dans le courant de 2012, L'avion s'affiche, Si l'aviation vous était contée, ou encore La compagnie générale Aéropostale : les autres lignes. De son côté, Pygmalion cible un public populaire élargi avec sa série des 12... qui ont changé l'histoire. «Plusieurs nouveautés sont prévues au printemps, consacrées aux reines, aux résistantes ou encore aux couturières", indique l'éditeur Charles Dupêchez. La filiale de Flammarion annonce également la création d'une nouvelle collection intitulée "Franck Ferrand présente". Le premier volume de la série, De quoi sont-ils vraiment morts ?, est annoncé pour cette année, avec un important tirage.

PETITES VENTES POUR L'ÉRUDITION

Les livres plus érudits peuvent cependant trouver leur public. Ce sont, sans surprise, les travaux sur >la Seconde Guerre mondiale qui ont réalisé les meilleures performances en 2012. Au Seuil, La fin : Allemagne, 1944-1945 de Ian Kershaw s'est écoulé à 30 000 exemplaires, tandis que, chez Gallimard, Terres de sang de Timothy Snyder a trouvé 11 400 acquéreurs selon Philippe Le Tendre, directeur des ventes. A la librairie L'Armitière, des titres comme La Seconde Guerre mondiale d'Antony Beevor (Calmann-Lévy) et L'héritage de Vichy (Armand Colin) figurent parmi les plus demandés. «L'ennui, c'est que les best-sellers concentrent le marché. Et le facteur aggravant, c'est que les sujets qui séduisent le public sont déjà ceux qui ont été les plus étudiés », pointe Fabrice d'Almeida, directeur littéraire histoire chez Fayard. La conséquence immédiate, ce sont des ventes moyennes allant de 1 500 à 5 000 exemplaires, et rarement au-delà, pour les titres abordant des périodes moins demandées. "Aujourd'hui, signer pour un livre qu'on vend à 5 000 exemplaires et plus, c'est une vraie satisfaction. Mais il y a encore quelques années, c'était peu", poursuit Fabrice d'Almeida. Paru en septembre, le Garibaldi de Pierre Milza est à 4 500 et représente l'un des meilleurs succès de 2012 chez Fayard.

NE PAS RENONCER À L'EXIGENCE

Pour Hélène Monsacré, chez Albin Michel, l'édition de recherche est entrée en "résistance", mais ne doit pas pour autant renoncer à la publication de textes exigeants. "Deux peuples en ton sein » :juifs et chrétiens au Moyen Age d'Israël Jacob Yuval et Le temps des laboureurs de Mathieu Arnoux ont marqué la fin de l'année de l'éditeur. Chez Armand Colin, la parution en deux tomes des Mondes de l'océan Indien témoigne de la volonté de la maison de «conserver une tradition bien établie de belles éditions définitives sur un sujet donné", selon Jean-Christophe Tamisier, le directeur général, qui annonce également la création d'une nouvelle collection intitulée "Autrefois" et tournée vers des métiers et des fonctions. Les premiers titres auront pour thèmes les brigands, les parlementaires et les soldats.

De son côté, Belin poursuit le développement de sa collection "Portraits historiques" avec une nouveauté sur Mahomet au premier semestre. L'éditeur a publié en octobre La route de la Kolyma, récit de voyage sur les traces du goulag par Nicolas Werth, spécialiste du stalinisme. L'historien publiera également en octobre prochain La grande famine soviétique chez Fayard, qui proposera par ailleurs en avril La douceur de l'ombre d'Alain Corbin, ouvrage relatif à l'arbre en tant que source des émotions. Chez Payot & Rivages paraîtra à l'automne la traduction du prochain livre de l'Indien Arjun Appadurai intitulé The future as cultural fact. «Le texte en version originale anglaise sort en mars, on peut difficilement faire plus vite. Ses deux précédents livres, Après le colonialisme et Géographie de la colère, sont déjà chez nous", indique Christophe Guias, directeur éditorial de Payot & Rivages, qui publie également en février la traduction de Repenser le colonialisme, un «texte fondateur dans notre façon d'appréhender l'histoire coloniale". Pour sa part, Flammarion annonce pour mars Comment j'ai cessé d'être juif de Shlomo Sand, dont l'ouvrage Comment la terre d'Israël fut inventée, paru en septembre, s'est vendu autour de 12 000 exemplaires et constitue avec Les gauches françaises l'un des succès de l'année pour l'éditeur.

Car malgré le contexte économique, exigence et succès ne sont pas toujours antinomiques. Flammarion l'a vérifié avec La bataille des trois empires : Lépante, 1571, écoulé à près de 6 000 unités. "Pour un livre de presque 1 000 pages, c'est exceptionnel », se félicite Sophie Berlin, la directrice éditoriale. Depuis la rentrée, La Découverte a déjà vendu plus de 6 000 exemplaires de son Histoire de l'Algérie à la période coloniale, >tandis qu'Histoire des mouvements sociaux en France et Histoire politique des services secrets français démarrent bien selon le P-DG de la maison, François Gèze. «Nous privilégions les gros ouvrages collectifs destinés au grand public, mais mobilisant des spécialistes. Les résultats sont convenables."

Chez Tallandier, La vérité sur la tragédie des Romanov de Marc Ferro a séduit 11 500 lecteurs. «Beaucoup de nos livres se sont vendus entre 3 000 et 7 000 exemplaires, assure Xavier de Bartillat. C'est satisfaisant car cela illustre un bon rythme de croisière." Même son de cloche chez Perrin, qui a pu compter sur les bonnes performances de Femmes de dictateur 2 de Diane Ducret et sur un catalogue attractif avec sept titres ayant franchi la barre des 10 000 ventes. "Le tome 2 de Femmes de dictateur s'est moins bien vendu que le tome 1, mais il atteint tout de même les 40 000 exemplaires", indique le directeur de la maison, Benoît Yvert. L'éditeur publiera deux nouveaux livres avec Diane Ducret, le premier à l'automne et le second en 2014. Pour Benoît Yvert, il est important de ne pas "inonder les librairies". Dans le souci affirmé de "privilégier le qualitatif sur le quantitatif", la production de Perrin est régulièrement réduite d'une année sur l'autre. «Nous publions autour de 130 titres par an, contre 145 lors de mon arrivée. En 2013, la production diminuera encore : pour les nouveautés pures, nous serons à une soixantaine, contre 73 en 2010."

INVESTIR DE NOUVEAUX TERRITOIRES

Même s'il développe fortement le catalogue de sa collection de poche "Texto", Tallandier s'efforce également de calibrer sa production en fonction de la demande, sans hésiter toutefois à investir des terrains a priori peu vendeurs. Histoire de la Corée, paru en novembre et tiré à 2 800 exemplaires, s'inscrit dans une tendance d'ouverture au monde revendiquée par Xavier de Bartillat. En histoire étrangère, Stèles (Seuil), qui traite de la grande famine chinoise consécutive au "Grand bond en avant", a trouvé son public avec plus de 5 500 unités vendues. En revanche, Les nouveaux communistes chinois, chez Armand Colin, n'a que "moyennement marché" d'après Caroline Leclerc, récemment partie de la maison d'édition pour devenir apporteuse d'affaires. "Le public est peut-être plus conservateur qu'autrefois dans ses goûts, mais cela ne doit pas conditionner toute la production éditoriale. L'édition historique doit tenir bon et rester inventive", plaide Séverine Nikel, éditrice au Seuil. Un plaidoyer pro domo appuyé par ses dernières parutions. L'histoire à parts égales : récits d'une rencontre Orient-Occident de Romain Bertrand a séduit 3 800 acheteurs. La maison entend bien continuer son exploration des champs pionniers. «Patrick Boucheron va développer chez nous pour 2015 un grand projet collectif autour de l'histoire mondiale", annonce Séverine Nikel.

Les grands classiques restent toutefois de bons vecteurs de croissance, à commencer par l'histoire de France qui bénéficie actuellement d'un large renouvellement historiographique. Belin a achevé en mars dernier sa grande "Histoire de France" en 13 volumes, étoffée en octobre par un Atlas de l'histoire de France réunissant toutes les cartes utilisées dans la collection. «Tous les titres parus depuis plus de douze mois ont été réimprimés. Nous sommes aujourd'hui à plus de 140 000 exemplaires vendus sur les deux éditions (prestige et brochée)", se félicite Sylvie Marcé, P-DG de Belin. L'éditeur a complété sa gamme avec la parution du Grand atelier de l'histoire de France, synthèse qui réunit en trois volumes (Le Moyen Age, Les temps modernes et L'époque contemporaine) les sources et l'historiographie de chaque période. «Avec l'histoire de France, nous avons fait le pari de l'intemporalité, ce qui nous permet de moins souffrir de la crise du secteur", résume Sylvie Marcé.

ÉLARGIR LE PUBLIC

Les Puf relèvent le même pari avec, en mars, les deux premiers tomes d'une nouvelle série intitulée Histoire personnelle de la France des origines à nos jours, dirigée par Claude Gauvard. "Chaque volume comprendra 224 pages et sera proposé à 14 euros. Cela répond à notre volonté d'élargir notre public et de nous installer sur un créneau plus adapté aux pratiques étudiantes aujourd'hui", détaille Monique Labrune, présidente du directoire des Puf. De son côté, Ellipses annonce aussi pour 2013 un gros volume unique sur l'histoire de France. "Il est destiné aux étudiants désireux de se remettre à niveau avec une offre plus synthétique que ce que proposent les nouvelles grandes collections", précise l'éditrice Anne Lacambre. Soit l'antithèse de l'Histoire de France des Gaulois à nos jours : en 25 fiches, également paru chez Ellipses en septembre dernier.

Le renouvellement de l'historiographie française sera aussi assuré au Seuil, qui poursuivra son Histoire de la France contemporaine, entamée en octobre 2012, avec la parution à l'automne de deux volumes supplémentaires dans une série dirigée par Johan Chapoutot, qui comptera en tout 10 tomes. Plus ludique, Fayard publiera en mars L'invention des Français de Jean-François Kahn, "une analyse drôle de 600 pages, qui propose une lecture de la Gaule pour montrer qu'on y observe des traits de fonctionnements qui caractérisent encore les Français aujourd'hui", explique Fabrice d'Almeida. Dans la même veine, Perrin proposera en octobre un essai de Jean Sévillia sur l'histoire nationale.

L'histoire en chiffres

L'HISTORIOGRAPHIE DEVIENT TENDANCE

Deux nouvelles collections consacrées à l'étude de l'historiographie verront le jour en 2013 : "Ecritures de l'histoire", en avril à La Découverte, et "La vie des idées", aux Puf. La Découverte démarre avec Le fascisme et Histoire et mémoires. "Cela fait longtemps que les travaux de réflexion sur la façon dont on fait l'histoire se multiplient. Les grandes querelles doctrinales entre l'histoire marxiste, de droite, institutionnelle, etc. sont terminées. Aujourd'hui, le paysage s'est brouillé, d'où la nécessité de prendre du champ, notamment pour l'histoire coloniale, l'histoire globale », décrypte le P-DG de La Découverte, François Gèze.

Aux Puf, "La vie des idées" accueillera des titres de toutes les disciplines, avec notamment deux parutions en histoire au premier semestre : Nouvelles perspectives sur la Shoah et Pour une histoire-monde.

D'autres éditeurs s'inscrivent dans la même tendance : Armand Colin a publié le 23 janvier Homo historicus ; tandis que Flammarion propose en février Croire en l'histoire.

Le poche séduit... et inquiète !

"Nous publions autour de 130 titres par an, contre 145 lors de mon arrivée. En 2013, la production diminuera encore : pour les nouveautés pures, nous serons à une soixantaine, contre 73 en 2010." BENOÎT YVERT, PERRIN- Photo OLIVIER DION

La place croissante du poche sur le marché du livre d'histoire continue d'inquiéter les éditeurs... même si ses bons résultats en librairie les incitent à le développer. "Le poche pose aujourd'hui un certain problème au marché du grand format, car il s'est installé dans la lecture habituelle, estime le P-DG de Tallandier, Xavier de Bartillat. Les collections historiques, Points, Champs ou Pluriel, étaient surtout destinées aux étudiants et aux spécialistes. Aujourd'hui, on peut acheter une biographie en poche comme on l'aurait fait en grand format." L'éditeur renforce donc sa collection "Texto" avec une trentaine de titres par an, contre quinze précédemment. "Nous n'avons pas le désir de surproduire, mais il est nécessaire que "Texto" atteigne sa surface d'impact en librairie", poursuit Xavier de Bartillat.

"Les poches sont pensés pour durer et les inédits se vendent surtout la première année." SOPHIE BERLIN, FLAMMARION- Photo OLIVIER DION

Perrin n'a pas ce problème de surface puisque sa collection "Tempus" a publié son 500e titre en 2012. "Nos concurrents développent beaucoup leurs poches. Nous aussi, mais en publiant moins pour ne pas saturer les libraires", indique le directeur de Perrin, Benoît Yvert. "Autrefois, les maisons d'édition avaient tendance à céder leurs droits aux grandes collections de poche, elles sont aujourd'hui nombreuses à créer leur propre collection, observe Fabrice d'Almeida chez Fayard. Le problème, c'est qu'un poche doit se vendre beaucoup pour être rentable. Certains éditeurs nous demandent des titres vieux de dix ans pour les passer en poche. Ils financent à perte du volume pour occuper les rayonnages." Cette stratégie ne pourra pas marcher pour tout le monde, estime-t-il.

"Le public est peut-être plus conservateur qu'autrefois dans ses goûts, mais cela ne doit pas conditionner toute la production éditoriale. L'édition historique doit tenir bon et rester inventive." SÉVERINE NIKEL, SEUIL- Photo OLIVIER DION

De fait, les inédits restent assez rares en poche. "Nous en publions peu en "Champs", indique Sophie Berlin, chez Flammarion. Les poches sont pensés pour durer et les inédits se vendent surtout la première année." Perrin limite également sa production d'inédits à trois ou quatre titres par an. De la même façon, en "Folio histoire", Gallimard n'annonce que deux inédits pour le premier semestre, De Lénine à Gagarine, une histoire sociale de l'Union soviétique et La Grèce et les Balkans. De son côté, Seuil n'exclut pas d'augmenter sa production avec des titres destinés aux étudiants. "Nous avons sorti un premier inédit au printemps avec Les empires coloniaux. En 2014, nous proposerons plusieurs inédits, dont une histoire de la Méditerranée arabe intitulée La mer des califes", annonce l'éditrice Séverine Nikel.

"Chaque volume comprendra 224 pages et sera proposé à 14 euros. Cela répond à notre volonté d'élargir notre public et de nous installer sur un créneau plus adapté aux pratiques étudiantes aujourd'hui." MONIQUE LABRUNE, PUF- Photo OLIVIER DION

LES BELLES HISTOIRES DE FRANCE EMPIRE

Trois ans après avoir racheté les éditions France Empire, Jean Castarède est un éditeur heureux. Passionné d'histoire - en particulier celle de sa Gascogne natale, mais pas seulement -, il construit un catalogue riche de livres qui lui tiennent à coeur, au rythme d'une soixantaine de titres par an (diffusés par Interforum).

Une partie est issue du fonds de la maison et de sa bibliothèque personnelle avec des livres qu'il réédite sous une nouvelle maquette et souvent avec une préface de sa main. Une autre partie est constituée de nouveautés qui élargissent un peu le champ. Il a ainsi notamment publié Oui à l'économie en français, c'est plus clair ! d'Alfred Gilder, préfacé par le secrétaire général de l'Organisation internationale de la francophonie, Abou Diouf. Il vient également de créer une petite collection en clin d'oeil, "Pour les surdoués", avec par exemple Ces auteurs qui ont raconté la France, une anthologie de textes littéraires donnant une image de la France.

En histoire, il aime publier les oeuvres "qui racontent" le passé. Ce n'est pas un hasard s'il réédite Guy Breton et ses Amours qui ont fait la France ou s'il publie ce mois-ci L'amour et l'esprit français du XVe au XIXe siècle. Il se met à l'ouvrage lui-même régulièrement : il a publié en octobre La folle histoire de la Fronde. C. F.

COMMÉMORATIONS : DÉJÀ LA GRANDE GUERRE

Le centenaire de la Première Guerre mondiale approche à grands pas et les éditeurs anticipent ce qui sera sans doute l'événement éditorial des années 2014-2018. Fayard annonce la publication à l'automne 2013 du premier des trois volumes en français de la Cambridge History of the World War. "Chaque volume comprend 1 000 pages, la parution se fera simultanément en français et en anglais", explique Fabrice d'Almeida, directeur littéraire histoire chez Fayard. L'éditeur proposera également Le jour le plus meurtrier de l'histoire de France : 22 août 1914 et Histoire religieuse de la Grande Guerre. Au Seuil, Séverine Nikel annonce Histoire sociale des tranchées, ouvrage qui "contredit l'idée d'un brassage social pendant la guerre", et Quelle histoire, un récit de filiation de Stéphane Audoin-Rouzeau.

Chez Payot-Rivages, la "Der des ders" sera surtout l'occasion de publier les textes de grands auteurs relatifs à la période : Henri Barbusse, Romain Rolland, Raymond Radiguet, Emil Ludwig, Walter Benjamin, Freud... Albin Michel prépare une étude sur la justification de la guerre à partir des points de vue allemand et français au sein des communautés intellectuelles des deux pays ; Tallandier centrera sa production sur l'histoire militaire, notamment au sein de sa collection "L'histoire en bataille" ; Flammarion se penchera sur les six mois précédant le déclenchement du conflit avec Les somnambules ; les Puf préparent un "Que sais-je ?" intitulé Les 100 mots de la Grande Guerre. De son côté, Perrin a anticipé en publiant en deux tommes en "Tempus" Encyclopédie de la Grande Guerre, "considérée comme la référence depuis sa publication chez Bayard", souligne Benoît Yvert, le directeur de Perrin, qui annonce également le journal inédit d'un des chefs d'état-major de la Grande Guerre. "Une maison comme la nôtre ne peut pas être absente de cet événement, mais on ne sera pas moutonnier", assure-t-il. En beau livre, Les Arènes préparent pour la rentrée 2013 trois ouvrages aux tirages compris entre 20 000 et 50 000 exemplaires.

Cette avalanche précoce éclipse un peu le 70e >anniversaire, cette année, de la mort de Jean Moulin. Tallandier publie toutefois le 4 avril un album de photos, dessins et lettres inédites du grand résistant qui devrait, espère-t-on chez l'éditeur, séduire un large public.

LES MEILLEURES VENTES EN HISTOIRE

 

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