Le scénariste et acteur de théâtre Vincent Zabus et le dessinateur Thomas Campi >observent à la loupe les habitants sans signe particulier d'un même immeuble.
Ils ont tous deux une très courte quarantaine. Mais l'un, Vincent Zabus, est belge, qui mène une carrière dans le théâtre comme auteur et comédien. L'autre, Thomas Campi, qui est né et a grandi en Italie, vit et dessine actuellement en Chine. Ensemble, mais à distance, ils ont fait Les petites gens, c'est-à-dire beaucoup avec pas grand-chose.
L'action, si l'on peut dire, s'organise autour d'un seul immeuble qui pourrait se situer dans une ville italienne, puisque c'est Thomas Campi qui tient les pinceaux ; mais pas forcément, si l'on en croit certaines vignettes. Elle concerne ses habitants, apparemment sans histoire. Et on ne pourra s'en plaindre car tel est bien le propos du livre : raconter les histoires de gens qui n'en ont pas.
En entomologistes scrupuleux, Vincent Zabus et Thomas Campi ont rassemblé une demi-douzaine d'objets d'étude. Paul est un fonctionnaire résigné, qui aspire à une vie casanière. Louis et son père se sont enfermés en eux-mêmes depuis la mort prématurée de leur mère et épouse. Irina tente sans illusions de revivre les émotions de sa jeunesse de danseuse professionnelle. Lucie occupe sa vieillesse comme elle peut, tout en faisant des ménages pour compléter sa maigre retraite. Monsieur Armand fait bibliothécaire de quartier depuis sa fenêtre du rez-de-chaussée, d'où il voit défiler tous ses voisins. A chacun, il va arriver quelque chose - oh ! rien de spectaculaire- qui va modifier sa situation, son humeur et son rapport aux autres.
A ce stade, on craint le pire, et on a tort. Car, non sans humour, Vincent Zabus et Thomas Campi s'y entendent pour soumettre avec une extrême douceur leurs antihéros à des propositions bancales, vaguement absurdes. Ce recul leur évite de basculer dans le pensum bien pensant, sans les empêcher, loin s'en faut, de cerner les petits riens de ces vies minuscules.
