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Délais de paiement : le SLF tire la sonnette d’alarme

Le SLF demande une dérogation claire permettant le maintien de la souplesse actuelle des délais de paiements pour les libraires - Photo Jacqueline Macou / Pixabay

Délais de paiement : le SLF tire la sonnette d’alarme

Une réduction drastique à 30 jours des délais de paiement tel que l’imposerait la proposition de réforme de la Commission européenne pourrait mettre en péril un tiers des librairies françaises, générant un choc de trésorerie de plus de 110 millions d'euros, selon une étude du Syndicat de la librairie française.

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Par Éric Dupuy
Créé le 19.02.2024 à 16h55

Un projet de règlement en cours de discussion au Parlement européen, censé protéger les petites entreprises, risque de fragiliser une filière culturelle déjà précaire, selon une étude Xerfi publiée par le Syndicat de la librairie française (SLF).

Automatisation des pénalités de retard

Le rapport révèle que la réduction, drastique, des délais de paiement à 30 jours en BtoB, entraînerait un « choc de trésorerie » de plus de 110 millions d'euros pour les librairies françaises. Selon le SLF, il mettrait en péril la survie d'un tiers des librairies du pays, soit environ 1 300 établissements, qui se retrouveraient en cessation de paiements. 

Cette mesure européenne vise pourtant à soutenir les petites entreprises en limitant les retards de paiement abusivement longs. Elle doit rigidifier une mesure en vigueur depuis 2011, en automatisant les pénalités de retard, sans distinction de secteur. Et c’est ce que reprochent de nombreuses filières à Bruxelles, dont celle de la librairie.

100 jours pour vendre un livre

Ces dernières bénéficient actuellement d’une exemption sectorielle, rappelle le SLF. Elles sont confrontées à des défis spécifiques liés à la nature même de leur activité : les livres ont des rotations lentes, entraînant la nécessité de délais de paiement plus longs pour correspondre à ces cycles de vente. Un livre s’y vend, en moyenne, au bout de 100 jours à partir de sa date d’achat. « Comment payer au bout de 30 jours un livre que l’on vend au bout de 100 ? » interpelle le syndicat. Les best-sellers et les livres à rotation rapide représentent une part minime de l’activité, note Xerfi. Les 1 000 meilleures ventes concentrent ainsi moins de 20 % des ventes, une part qui dépasse à peine les 45 % pour les 10 000 meilleures ventes.

L’étude, réalisée sur la base d’un échantillon de 172 librairies indépendantes, révèle que les deux tiers des librairies restantes utiliseraient en moyenne 75 % du montant total de leurs fonds propres pour amortir le coût de la réduction des délais de paiement. Les librairies ont en moyenne près de 30 jours de leur cycle d’exploitation à financer, souligne également l’étude.

Dans le secteur de la librairie, on observe une certaine homogénéité des délais de règlement, qui s’établissaient à environ 76 jours d’achats quelle que soit la taille des structures. Ces délais permettent aux libraires de partager en partie le portage du stock avec les éditeurs.

Réduire le stock ou se diversifier

Deux principales options s’offrent aux détaillants, indique Xerfi : réduire le stock, ce qui semble fatal à terme, et trouver de nouvelles sources de financement dans cette période d’augmentation des taux d’intérêt et de frilosité des banques. Face à cette situation critique, le SLF appelle les parlementaires européens et la Commission européenne à reconsidérer ce projet de règlement. Ils demandent une dérogation claire permettant de maintenir la souplesse contractuelle actuelle, cruciale pour la survie des librairies. La Commission s’est donné jusqu’à juin prochain pour finaliser la mesure. 

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