27 octobre > Histoire France > Fanny Cosandey

Chacun connaît l’expression "tenir son rang". Mais qu’y a-t-il derrière ? Que révèle donc ce "rang", comment l’obtient-on et que doit-on faire pour le garder ? Dans ce travail passionnant qui plonge dans les volumineuses archives de l’Ancien Régime, Fanny Cosandey (EHESS) examine l’étiquette et le théâtre du pouvoir qui se met en place à la cour. D’Henri III à Louis XIV, elle décortique cette "grammaire du rang" en s’intéressant principalement à Versailles, qui reste emblématique de cette société hiérarchisée.

L’auteure de La reine de France (Gallimard, 2000) montre que ces gens de pouvoir sont aussi du pouvoir. Ils appartiennent au roi qui détermine leur place dans les divertissements, les cérémonies et par rapport aux autres membres de la cour. Il s’agit pour le monarque de mettre en quelque sorte de l’ordre dans sa maison en faisant fonctionner son "système de la faveur". Même ceux qui le dédaignent en usent. Ainsi, Henri IV, plus préoccupé par le rétablissement de la paix dans un pays en ruine, se sert de ce système de préséance pour promouvoir le sang royal, légitimer ses fils adultérins et leur ménager une position honorable après la naissance du Dauphin.

Evidemment, ces préséances qui sont le fait du prince génèrent des conflits. Au XVIe siècle, le duc de Nevers, mécontent de son rang, renonce aux noces de Charles IX. Les sujets contrariés tiennent ensuite des propos sur l’appareil monarchique à la mesure de leurs intérêts pour tenter de retrouver leur position. "L’assignation des places à l’intérieur de la famille royale et le sort réservé à l’épouse en particulier ne sont pas fondamentalement différents de ce qui se pratique dans le reste de la société", constate Fanny Cosandey. Voilà pourquoi le rang touche au plus près des rouages politiques.

En nous livrant les secrets des principes d’assignation des rangs dans l’espace politique de la France d’Ancien Régime, l’historienne indique combien ce système élitiste s’est répandu dans la société. "Le rang relève du patrimoine dont il est à la fois une des composantes et une des expressions." Pas sûr que la République ait totalement fait disparaître du microcosme politique, des esprits du moins, l’idée de ces surclasses sociales. L. L.

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