Danse de la vie brève est le premier roman de celui qui publiait il y a deux ans Comment je ne suis pas devenu poète (La Lettre volée, 2014). Hubert Antoine, Belge né en 1971, est installé au Mexique depuis vingt ans. Poète et auteur aux éditions Le Cormier d’Exercices d’évasion (2011) et de Tohu-bohu et brouhaha (2013), il retrouve Verticales où avait paru en 2006 Introduction à tout autre chose, un recueil de contes.
Logiquement, pourra-t-on dire, il met sa prose amoureuse et sensuelle au service de trois Mexicains en cavale : un jeune vagabond d’origine indienne, un père veuf et sa fille de 23 ans qui fuient un crime dont ils ont été en réalité les victimes. C’est elle, Melitza, qui raconte mais c’est le père qui traduit et commente le journal intime en trois carnets qu’elle a tenus de janvier à octobre 2006. Ce récit "subjectivement lié à la sensibilité de [sa] fille" débute à Guadalajara, le jour qui suit sa rencontre avec Evo, clochard céleste au sang huichol. Il se poursuit au bord du Pacifique où la jeune femme tente de se remettre du viol qu’elle a subi. La cavale se termine à Oaxaca au moment d’un soulèvement populaire contre le gouverneur corrompu de la province connue sous le nom de "Commune d’Oaxaca".
"Papa m’a toujours conseillé de me contrôler le moins possible afin d’être à l’écoute de mes sens. Dans sa logique éducatrice, cela veut dire : vivre d’impulsions et de saveurs", "dans les valeurs de la joie et de la curiosité", rapporte avec tendresse la jeune femme dans son journal. Dans ce père inconsolable, ancien professeur de philosophie, témoin dans sa jeunesse d’autres "journées noires de l’histoire du Mexique moderne", d’autres rebellions violemment réprimées, Hubert Antoine a déposé toute son admirative ferveur. Véronique Rossignol