7 mai > Novella France

Auteur de thrillers exotiques et à succès emblématiques d’un certain néopolar made in France (Zulu, Mapuche, Utu), Caryl Férey s’offre cette fois une excursion du côté des Etats-Unis. San Francisco, ses quartiers gays et branchés, comme Haight-Ashbury, ses parcs, Golden Gate ou Bella Vista, où il s’en passe de drôles. Et de tristes : on peut même y mourir. Car, bien que Les nuits de San Francisco, roman court ou novella, ne soit pas un polar, les personnages, avec leurs histoires de cabossés de la vie, leurs drames à répétition et l’ambiance, assez glauque’n’roll, ne sont pas en totale rupture avec l’univers de Férey.

Sam, 21 ans, est un mauvais sujet. Un Sioux oglala de la tribu des Lakotas, ceux même qui ont été massacrés à Wounded Knee ("Genou blessé") en 1890 par les Tuniques bleues. Quittant sa réserve, il est parti pour Vegas, bosser sur des chantiers. Mais la crise est passée par là. Le voilà SDF à San Francisco, traînant sa misère et, dans ses gènes, le fol espoir de liberté de son peuple.

Un jour, il voit venir à lui, comme une apparition, une jeune fille amputée d’une jambe. Elle s’appelle Jane, et a connu bien du malheur.

Originaire de Fresno, "la ville la plus bête d’Amérique autant dire du monde", elle a été violée à l’âge de 19 ans par Carver, son petit ami de l’époque. Pour rompre, tenter d’oublier, elle fuit vers Frisco, où elle devient mannequin à succès. Au gré d’une rencontre, elle tombe amoureuse de Jefferson Whiteboon, le chanteur-guitariste du groupe Blood. Ils vivront un semblant de bonheur, sur fond de paradis artificiels et de rock garage. Un fils naît, Duane. Mais leurs destinées basculent dans un accident de voiture. Désormais infirme, et pas seulement de sa jambe, Jane s’autodétruit dans les rues, les parcs et les lieux malfamés de la ville. Elle croise Sam au Golden Gate Park, l’adopte, le baptise Deux-Ours. Ils se racontent leurs pauvres vies, traînent dans des bars gothiques. Ces deux-là se sont trouvés, ils ne se quitteront plus, quoi qu’il arrive…

Le livre de Caryl Férey est bref et dense, chargé en émotion mais sans pathos, truffé de clins d’œil et servi par une belle écriture. Et très ancré dans la mythologie des Etats-Unis - violente.

J.-C. P.

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