Le ministère de la Culture l’a finalement trouvé, son « véhicule législatif », pour introduire l’accord auteurs-éditeurs dans le Code de la propriété intellectuelle (CPI) : il ajoutera un amendement à la proposition de loi sur la vente à distance de livres, discutée au Sénat le 8 janvier prochain, en soirée. Le gouvernement proposera au vote un article d’habilitation l’autorisant à faire entrer le nouveau contrat d’édition dans le CPI par voie d’ordonnance. Les articles d’une ordonnance ont force de loi, mais sont directement rédigés par l’exécutif, sans être discutés dans le détail par les parlementaires, qui en votent juste le principe. Le texte est d’ailleurs déjà rédigé au ministère.
Cette solution, envisagée depuis plusieurs mois, permettra de résoudre l’engorgement de l’agenda des députés et des sénateurs, submergés de lois à voter. En évitant toute intervention parlementaire dans le détail des nouvelles dispositions, elle préservera aussi l’équilibre de cet accord que les représentants des auteurs comme ceux des éditeurs jugent très délicat : de part et d’autre, chacun aurait souhaité voir ses intérêts plus avantagés dans les futurs contrats, mais tous craignent aussi que la moindre modification du compromis remette l’ensemble en cause. D’autre part, les auteurs ne supportaient plus de ne pas bénéficier de cet accord, alors qu’il est enfin conclu.
Après le vote du Sénat, la proposition de loi reviendra à l’Assemblée. Si elle est votée dans les mêmes termes, le gouvernement publiera cette ordonnance et le nouveau contrat d’édition entrera en vigueur, sous forme de règlement. Pour devenir une loi, elle devra toutefois être approuvée par un nouveau vote du Parlement, qui pourra intervenir lors de la discussion du texte Création, probablement au second semestre 2014.
Quant à l’article de la proposition de loi interdisant le cumul de la réduction de 5 % et de la livraison gratuite pour la vente de livres sur Internet, il suit son cours. Son principe a même été renforcé lors de la discussion en commission de la Culture, au Sénat, le 18 décembre dernier. Il a été approuvé à l’unanimité. Même si les députés doivent le reprendre en seconde lecture, puisqu’il a été légèrement amendé, la mesure est acquise, et entrera en vigueur dès son vote à l’Assemblée nationale.
Bariza Khiari, sénatrice PS de Paris et vice-présidente du Sénat, en était la rapporteure, comme elle l’était déjà de la loi sur les livres indisponibles, votée en 2011. Elle se forge ainsi une expérience dans ce domaine. A cette occasion, elle a rencontré Andrew Cecil, le lobbyiste d’Amazon, pas spécialement ému par cette loi dirigée contre son groupe. Il est vrai qu’elle permettra aussi au cybermarchand d’améliorer ses marges sur le livre, comme la Fnac en son temps, lorsque la loi Lang alors conçue contre les grandes surfaces avait été instaurée.
Hervé Hugueny