Avant-critique Mémoires

Zitkála-Šá, "Une enfance amérindienne" (Bartillat)

Zitkála-Šá - Photo © DR/Bartillat

Zitkála-Šá, "Une enfance amérindienne" (Bartillat)

Les mémoires de Zitkála-Šá, première compositrice d'opéra amérindienne et championne des droits autochtones, sont traduits intégralement.

Parution 7 novembre

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Par Sean Rose
Créé le 14.11.2024 à 09h00

Itinéraire de l'Oiseau rouge. Ne pas respecter la prononciation du nom d'une personne, c'est faire offense à son identité. Au temps des colonies, les noms indigènes étaient soit adaptés à la prononciation de l'idiome des colons soit carrément remplacés par d'autres issus du répertoire de la langue dominante. Zitkála-Šá est née en 1876 au sein de la réserve des Indiens yanktons (Dakota du Sud), un des peuples dakotas, appartenant à la nation sioux. Longtemps, elle a été connue par son état civil américain, anglicisé et de femme mariée : Gertrude Simmons Bonnin. Cette Amérindienne choisit quant à elle de s'appeler « Oiseau rouge » en dakota. Compositrice du premier opéra amérindien inspiré des thèmes de la culture autochtone, Zitkála-Šá est l'autrice de mémoires dont l'intégrale est à présent disponible aux éditions Bartillat.

Aujourd'hui, le nom de Zitkála-Šá n'évoque pas grand-chose dans l'esprit du grand public, contrairement à celui des chefs indiens comme Sitting Bull ou Crazy Horse, mais l'autobiographie de cette femme arrachée à sa culture d'origine à l'âge de 8 ans obtint pourtant un grand succès à sa sortie. La naissance de l'autrice d'Une enfance amérindienne correspond à la bataille de Little Big Horn, dernière grande victoire des Indiens contre les « visages pâles », et chant du cygne des nations autochtones vouées au déclin et à la marginalisation.

Zitkála-Šá raconte ses années d'enfance auprès de sa mère. Malgré l'environnement fruste, la petite fille est heureuse, élevée dans l'amour d'une famille élargie, elle jouit d'une liberté dont elle ne trouvera plus jamais l'équivalent dans sa vie adulte. Retirée de la réserve par les missionnaires pour être « éduquée », la fillette yankton est placée dans une école quaker où on lui coupe les cheveux, lui impose des vêtements occidentaux et la prière quotidienne... Dans ces pages, on goûte son lyrisme candide, un ton élégiaque pleurant un monde bucolique en allé avec l'acculturation forcée des Sioux. Zitkála-Šá fut surtout une pionnière des droits autochtones, fondatrice d'un lobby qui défendit les Amérindiens auprès des autorités fédérales à Washington, préfigurant le red power. Et sa vision poétique d'une communion avec la nature, renvoyant dos à dos les superstitions indigènes et les dogmes du christianisme, de toucher encore, faisant écho à nos contemporaines préoccupations écologiques.

Zitkála-Šá
Une enfance amérindienne
Bartillat
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Lucien d'Azay
Tirage: 2 000 ex.
Prix: 20 € ; 208 p.
ISBN: 9782841007783

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