Mes chers amis, je crois que je suis maso. Déjà qu’une rentrée littéraire, c’est difficile, mais quelle mouche suisse m’a piqué pour que j’aille faire une signature à Deauville ? En plein festival du film américain. Comment ai-je pu penser un seul instant que les gens allaient s’intéresser à ma petite prose faussement dépressive alors que Brad Pitt était dans la ville ! Oui, tenez-vous bien, je suis passé après Michael Douglas, Matt Damon, Georges Clooney et Brad Pitt. Je me demande si je ne suis pas en train de devenir le Ringo Starr de la littérature. Ce qui n’empêcha pas ce moment de douce humiliation (une habitude de la vie d’écrivain) d’être fort sympathique. Enfin, c’est assez fou de voir Deauville sous les flash et la frénésie champagne, alors qu’en mai dernier, pour le salon du livre, c’était ambiance soupe. Je me suis surpris à un rêve : et si on inversait ? Et si Brad Pitt faisait une signature avec peu de monde, et moi, j’arrivais dans la folie extatique des jeunes et vieilles filles ? « David ! ! » « David, s’il vous plaît ? ! »… « Oh quel livre ! ! »… Et les femmes s’évanouiraient sur mon passage merveilleux, en compagnie de ma Angelina à moi, la star du Télérama de cette semaine… Cessons de rêver. Je n’ai pas à me plaindre. Mes livres sont publiés, j’ai des lecteurs qui achètent mes livres sans qu’on les force. Et je suis invité à la télévision pour parler de mon travail. Encore une fois, j’ai raté mon passage à « Vol de Nuit ». Cela devient une habitude, le crash de ce vol. Je ne sais pas pourquoi. Poivre est toujours sympathique, il met à l’aise ses invités, mais il n’y a rien à faire : je m’embrouille, je suis confus, je ne sais plus que dire. L’animateur est persuadé que c’est une stratégie pour faire le malin et l’original. Mais vous croyez que c’est facile que de passer pour un analphabète à la télé ? De toutes façons, tout ça c’est de la faute de Patrick Besson ! Tiens je vais le charger ! Après tout, je doute vraiment d’être sur la liste du Renaudot. Quand j’avais eu le Prix Roger-Nimier, il m’avait dit : « tu crois vraiment que j’allais voter pour un écrivain qui habite dans le 13 ème arrondissement ? ». Comme je n’ai pas déménagé, je suis toujours en état de Val de Grace. Donc, ce cher Patrick Besson, me dit : « Je reviens du Congo. Je t’ai vu parler de ton livre sur I-Télé. Ils ont passé ton interview huit fois dans la journée. Autant dire que je connais par cœur ton speech… ne me dis pas que tu vas répéter la même chose ici ? ». Et voilà comment je me suis fait avoir. Le méchant m’a déstabilisé. Pendant que je parlais, je me disais : « Besson va se dire que je répète tout le temps les mêmes trucs ! ». Je suis vraiment con de me soucier de l’avis de Besson. Est-ce qu’il s’en soucie lui de la vie des autres ? A un moment, j’ai parlé d’une anecdote à la FNAC, et j’ai senti son petit sourire : « Ah, ça y est, il nous refait le coup de la FNAC… ». Trop fort ce Besson pour saper mon nouveau look. A sa place, si je voulais me faire pardonner, je me mettrais sur la liste du Prix Renaudot. Enfin, un grand bienvenue à la librairie Gibert qui vient d’ouvrir… en bas de chez moi !
15.10 2013

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