En 2011, la narratrice du nouveau livre de Julie Wolkenstein trie les papiers de son père décédé peu avant et enterré au cimetière de Meudon. Il s'agit là d'une femme divorcée, écrivaine, qui aime organiser pour le pont du 14 juillet un week-end "no kids" où les amis viennent sans enfants profiter du bon air, du chablis et des bulots mayonnaise. La chose se déroule dans sa maison de Saint-Pair, près de Granville. Maison qui lui vient de son arrière-grand-mère, Adèle, véritable coeur d'Adèle et moi.

L'écrivaine cherche à en savoir plus sur son aïeule. A 10 ans, en 1871, celle-ci fut envoyée au bord de la mer, à Saint-Pair justement, loin d'un père médecin, "veuf et coureur", et de Paris assiégé. D'Adèle, elle sait qu'elle a eu un mari, quatre enfants. Qu'elle partageait son temps entre un hôtel particulier rue Barbet-de-Jouy, une maison à Sèvres et une autre à Saint-Pair. Veuve à 48 ans, elle s'est éteinte en 1941, très "pieuse, limite bigote".

L'héroïne de l'auteure de L'heure anglaise (P.O.L, 2000, repris en Folio) et de L'excuse (P.O.L, 2008, repris en Folio) se lance dans une enquête familiale et se met à reconstituer la vie d'Adèle. A Annecy, où elle se rend pour parler de ses livres, elle retrouve tante Odette, 86 ans, qui loge dans une "résidence pour seniors". Bibliothécaire à la retraite, Odette lui relate la liaison qu'elle entama, célibataire et quadragénaire, avec un jeune homme. Liaison qui dura trente ans et s'acheva à la mort de l'aimé dans un accident de voiture.

Odette lui remet le journal d'Adèle. Où l'on en apprend plus sur ses années de pension, ses parties de chasse avec son père, l'infarctus qui fit s'effondrer ce dernier sur le sol d'une palombière. Puis Adèle rencontra Charles Armand, cadet d'une famille alsacienne désargentée. L'épousa contre l'avis de son tuteur. Chemin faisant, le lecteur partage ses bonheurs et ses drames, ses promenades et sa passion pour le cinéma.

Adèle et moi mélange subtilement récit et roman, hypothèses, spéculations et inventions, de manière labyrinthique. Il en résulte un livre aussi singulier que fascinant.