Quatrième Goncourt pour Gallimard en dix ans, mais le premier en cinq ans. La vénérable maison voit son audace récompensée. Après l’éloge critique, le choix des libraires et du public (250 000 exemplaires vendus) et le grand prix du roman de l’Académie française, Les bienveillantes obtient donc ce fameux Goncourt. Couronnement logique après un tel parcours mais inhabituel pour un premier roman en langue française.
On peut s'étonner du double prix des Bienveillantes, même si ce n'est pas une 'première'. Mais surtout, depuis quelques semaines, son auteur Jonathan Littell n’avait plus forcément le vent en poupe. Il avait clamé son désintérêt pour le prix et son grand chelem – il était sélectionné dans toutes les listes – jouait en sa défaveur. Dès la remise du grand prix du roman de l'Académie française, les jeux semblaient de nouveau ouverts. Les outsiders (Vallejo en tête) avait réussi à faire monter la rumeur d'une victoire surprise. François Nourrissier lui-même positionnait Littell en 'Houellebecq de l’année'. Mais comment résister à un tel phénomène ?
Elu à la majorité absolue.
L’intense campagne de médiatisation et l'ambition indéniable de l'oeuvre auront eu raison de ses concurrents : 7 voix contre 3, dès le premier tour! Une voix pour Michel Schneider, une autre pour Stéphane Audeguy (qui n'était pas dans la dernière sélection) et enfin une pour... Elie Wiesel!
Absent du rituel, il est ainsi resté fidèle à ses déclarations où il se disait désintéressé. Attitude rare qu'Antoine Gallimard a pondéré par la lecture d'un mot dicté par le gagnant : 'Il est très heureux et il prend ce prix comme du bon pain. (...) Il me dit qu'il préfère rester en retrait. Il est très content comme il l'a été pour le Grand prix de l'Académie française.' M. Gallimard tient à préciser que Jonathan Littell 'souhaite que son absence ne soit pas un malentendu et encore moins une forme de mépris pour le jury.' Il la justifie 'par pudeur' et aussi parce que, selon l'auteur, 'la littérature n'est pas dans la société du spectacle, que ce qui est important, c'est le livre.'
L'éditeur a aussitôt annoncé : 'Nous allons faire un nouveau tirage de 150.000 exemplaires dès aujourd'hui, mais je n'ai du papier que pour 90.000 exemplaires.'
C'est seulement la troisième fois dans l'histoire du Goncourt qu'un auteur dont le français n'est pas la langue maternelle est récompensée. Jonathan Littell rejoint aussi le club très privé des dix Goncourt de nationalité étrangère. Il s'agit du premier auteur américain à recevoir ce prestigieux prix.
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Notice : Jonathan Littell, Les bienveillantes (Gallimard)
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