Justice

Dans un arrêt rendu le 21 février, la cour d’appel de Paris a estimé que rien ne justifie que les travailleurs à domicile (TAD) de Gallimard soient "les seuls exclus du bénéfice de la mutuelle obligatoire de l’entreprise, alors que leur statut ne présente aucune spécificité en termes de mutuelle complémentaire". Soutenus par le syndicat des correcteurs CGT, cinq d’entre eux (correcteur, lecteurs-correcteurs ou préparateurs-correcteurs) avaient porté en justice leur différend à ce sujet, dans la perspective que les autres TAD concernés puissent à leur tour faire valoir leurs droits. Les cinq obtiennent au total 56 500 euros de remboursement de frais de mutuelle et de dommages-intérêts.

"C’est un arrêt surprenant, qui renverse sur ce point la décision de première instance", note Sébastien Abgrall, directeur des ressources humaines du groupe Madrigall, qui observe toutefois que les demandes de rappel de salaire ont été rejetées. Au demeurant, sans attendre l’arrêt, Gallimard a remis dès le 1er janvier 2016 ses TAD sous le régime commun de couverture des frais santé, en application de la loi de sécurisation sur l’emploi du 14 juin 2013, constate la cour d’appel. Gallimard, qui a deux mois pour se pourvoir en cassation, n’a pas encore pris sa décision. "C’est un arrêt exemplaire sur la question de la discrimination, à laquelle sont confrontés les TAD qui sont les salariés les plus précaires de l’édition", se félicite de son côté Martine Prosper. La secrétaire générale du syndicat national Livre-édition de la CFDT estime que ce principe d’égalité de traitement pourra être utilisé dans d’autres dossiers.

A son corps défendant, Gallimard contribue à renforcer la protection des TAD, cet arrêt pouvant faire référence. "La seule différence de catégorie professionnelle ne saurait en elle-même justifier, pour l’attribution d’un avantage, une différence de traitement entre les salariés placés dans une situation identique au regard dudit avantage", souligne la cour d’appel.

L’affaire remonte à 2009 et a traîné pour des questions de procédure. Elle avait éclaté en raison d’un raidissement de la précédente DRH, alors que la maison se caractérise par des conditions plutôt favorables à ses TAD, reconnaissent les intéressés. Un changement des règles d’exonération fiscale avait fait craindre un renchérissement du contrat collectif santé, que Gallimard avait tenté de prévenir en imposant une solution propre aux seuls TAD, mais plus coûteuse pour eux. Hervé Hugueny

03.03 2017

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