Édito par Fabrice Piault, rédacteur en chef

Photo PHOTO OLIVIER DION

Dans son stimulant essai Du livre à la ville, tout juste paru chez l’éditeur genevois MétisPresses après que nous en avons donné un avant-goût en février dans nos colonnes (1), l’architecte Luigi Failla met au jour le changement profond de paradigme qui touche l’univers des bibliothèques. Rebondissant sur le concept de "troisième lieu", l’enseignant à Palerme et à Paris fait ressortir la déconnexion croissante du destin des bibliothèques et celui du livre. "Malgré les incertitudes sur la lecture et le fait que la transition technologique n’ait pas encore trouvé sa propre stabilité, les bibliothèques sont […] très fréquentées, voire saturées, par des usagers, observe-t-il. Bien sûr, la bibliothèque est encore inexorablement liée à la présence du livre et des documents, sans lesquels elle perdrait son identité", ajoute Luigi Failla. Mais le livre "y a déjà une fonction différente : […] il permet aujourd’hui de créer des "lieux de métalecture" capables de rassembler les gens."

Les bibliothèques universitaires sont à l’avant-garde de cette mutation qui touche la France depuis la toute fin des années 2000 en faisant du livre un moteur au service d’un projet beaucoup plus vaste. Ce n’est pas un hasard si, pour la première fois depuis sa création en 2010, elles ont été particulièrement nombreuses cette année à se porter candidates à notre grand prix Livres Hebdo des Bibliothèques francophones. En dépit de moyens souvent moindres que dans les autres pays développés, les bibliothèques universitaires françaises ne se contentent plus de juxtaposer collections et espaces de travail, mais pensent une offre globale, dans l’esprit du fameux Rolex Learning Center inauguré en 2010 à Lausanne. Ce n’est pas un hasard non plus si, pour la première fois également, le grand prix revient à l’une d’entre elles.

Nouvelle version métamorphosée de la bibliothèque universitaire de Lille-1, Lilliad incarne merveilleusement cette mutation. La lauréate de notre 8e grand prix a séduit le jury à l’unanimité. Par son ambition, par l’évidence de ses propositions et de son usage, par sa simplicité d’accès, son approche intuitive, Lilliad affiche, dans une version physique, l’ergonomie d’un site Internet bien pensé. Chapeau !

(1) "Architecture : vers la bibliothèque flexible", LH 1118, du 24.2.2017, p. 22-24.

08.12 2017

Les dernières
actualités