Côté dépaysement et suspense, les lecteurs de polars outre-Rhin font preuve d’un tropisme hexagonal. Et ils ont trouvé leur destination : le Finistère, où ils suivent avec passion les enquêtes du commissaire Dupin. Le personnage créé par Jean-Luc Bannalec, pseudonyme de Jörg Bong, directeur de la maison d’édition S. Fischer Verlag, en est à son troisième tome, Bretonisches Gold ("L’or breton"), paru chez Kiepenheuer & Witsch, et deuxième au classement littérature poche du Spiegel. La série, adaptée sur la chaîne publique allemande ARD, est un succès d’audience. "Il y a une grande demande pour les livres de Bannalec, souligne Martin Wiggejhoff, de la librairie spécialisée berlinoise Murder Books Inc. C’est une lecture de vacances légère, de facture classique, avec de belles descriptions de paysage." Le client type ? "Un francophile qui va souvent en Bretagne."
Une telle réussite a fait des émules, comme l’apparition sur la Côte d’Azur d’Isabelle Bonnet dans Madame le Commissaire, signé d’un improbable Pierre Martin et publié en avril chez Knaur. Son ingrédient principal : "La couleur locale", précise Patricia Kessler, attachée de presse du groupe. "La cuisine y joue un grand rôle. Celle-ci est associée à l’identité française. Dans ce type de livre, il n’y a pas que des meurtres et une enquête : on s’y délecte de bons repas et de vins."
Au moins deux autres détectives sont déjà sur place : Pierre Durand, sous la plume de Sophie Bonnet (autre pseudonyme) dans Provenzalische Verwicklungen ("Complications en Provence") paru en mars chez Blanvalet, et le capitaine Roger Blanc de Cay Rademacher (Mörderischer Mistral, "Mistral meurtrier", sorti en mai chez DuMont Buchverlag). Ce phénomène éditorial s’est fait une place auprès d’un public friand de "Regionalkrimis", polars attachés à une région allemande spécifique, genre en perte de vitesse mais qui garde ses aficionados.
Gilles Bouvaist, à Berlin